Yona Friedman : Architecture mobile, architecture vivante
« Je me considère comme un animal normal, c’est tout. » C’est tout ? Yona Friedman est aussi un artiste, un architecte et l’un des plus influents théoriciens de l’urbanisme du XXème siècle. La Cité de l’Architecture et du Patrimoine consacre jusqu’au 7 novembre 2016 une belle rétrospective à cet inventeur de la Ville spatiale.
Yona Friedman a complètement redéfini le rôle de l’architecte. « Mes idées ont été influencées par la Deuxième Guerre mondiale. » Enfant, il est dénoncé aux nazis dans la rue en Hongrie, un événement qui l’a marqué à vie, comme la destruction de Budapest d’où il est originaire. Il étudie en Israël puis s’installe à Paris. Il fonde dès lors le Groupe d’Étude d’Architecture Mobile (GEAM) en1958 et diffuse une vision nouvelle de l’architecture. Pour lui, l’architecte doit être un « consultant chargé de suivre l’élaboration des bâtiments construits par les habitants. » L’exposition contient des œuvres plastiques, des photographies, des collages et des archives issues de nombreuses collections publiques françaises qui éclairent une œuvre foisonnante.
Une ville fabriquée par et pour les habitants
« L’homme rêve d’habiter comme il veut, mais ne sait pas toujours ce qu’il veut. Il faut donc laisser à l’édifice une grande mobilité d’usages. Et pourquoi pas imaginer une ville qui serait entièrement fabriquée par les pratiques de ses habitants ? » Yona Friedman théorise la ville démocratique et l’harmonie des relations sociales, notamment dans son ouvrage essentiel, Comment vivre avec les autres sans être chef et sans être esclave ? (éditions Jean-Jacques Pauvert, 1974). Dans le film « Animal normal » réalisé par Caroline Cros et Antoine de Roux entre 2007 et 2014, il raconte en toute simplicité ce qu’a été sa vie. Filmé dans son appartement parisien, transformé en œuvre, l’homme livre sa philosophie où l’utopie est réalisable et où « l’individu redevient un acteur responsable de l’amélioration de son environnement ».
La Ville spatiale inspire de nombreux courants de pensée
Le visionnaire propose dans les années 60 un urbanisme tridimensionnel qu’il matérialise grâce à des collages surréalistes. C’est grâce à des cartes postales du Paris historique que l’architecte va réaliser ses photomontages. Ses idées trouvent écho au Canada, avec l’architecte Moshe Safdie, et au Japon avec Kenzo Tange, le chef de file des métabolistes. Ces derniers imaginent des villes dont la particularité est de s’étendre sur une large échelle, avec une structure extensible qui rappelle clairement une croissance organique. Un mouvement d’avant-garde qui affirme que « l’architecture relève du domaine public et pas du privé ». Les recherches anglaises d’Archigram et italiennes de Superstudio se basent aussi sur les travaux de Friedman.
Devenir autoplanificateur
Yona Friedman a également inventé un langage visuel pour transmettre ses idées. Il met au point des manuels de bande dessinée pour le ministère de la Culture qui lui passe commande en 1973 pour l’enseignement de l’architecture à l’école. C’est un succès. Les ouvrages sont traduits dans plusieurs langues. Friedman démontre ainsi la capacité du dessin à traduire des concepts sur un mode ludique, car « nous voyons mieux les choses en images ». Le programme d’architecture, spécialement conçu pour l’exposition, est à la disposition des visiteurs. De quoi devenir autoplanificateur et inventer la nouvelle Ville Spatiale.
Vos réactions
Bonjour, je trouve votre article intéressant mais j’aimerais bien connaître les sources de ce que vous affirmez ou que vous citez si cela est possible?
Notamment pour la citation « nous voyons mieux les choses en images ».
Merci et bonne journée