Un « créathon » participatif pour la ville durable
En avril dernier, Caen et Bordeaux ont vibré au rythme des “Créathons”. Étudiants et citoyens se sont retrouvés pour jouer les détectives du vivant, afin de dénicher des solutions efficaces aux défis environnementaux locaux. Ces événements ont montré comment la créativité collective peut contribuer à construire des villes durables.
La France pourrait connaître des températures extrêmes allant jusqu’à 55°C d’ici 2050. Pour adapter nos villes à ces conditions, la renaturation urbaine et l’inspiration du biomimétisme offrent des solutions prometteuses.
Sur ce thème, des “Créathons” se sont tenus à Caen et Bordeaux, respectivement les 4 et 10 avril 2023. Un Créathon, c’est un événement d’innovation où des équipes pluridisciplinaires se réunissent pour concevoir des projets répondant à des problématiques locales, le tout encadré par des experts et des entreprises régionales. Organisés par makesense, MoHo, et Ceebios, en partenariat avec les Régions Normandie et Nouvelle-Aquitaine, ainsi que les Villes de Caen et Bordeaux, ces événements ont rassemblé des jeunes, des citoyens engagés, et des experts pour une journée de réflexion collaborative. L’objectif était de trouver des solutions concrètes à des enjeux cruciaux comme la gestion de l’eau, la biodiversité, et la régulation de la chaleur en milieu urbain.
Le programme de ces journées comprenait des ateliers d’intelligence collective, des séances d’inspiration sur le biomimétisme et la présentation des projets avec un pitch final devant un jury. Ces Créathons ont permis de générer des idées novatrices adaptées aux spécificités locales. Explorons ensemble les résultats et l’impact de ces événements.
La nature comme modèle
Le biomimétisme a été le fil conducteur des Créathons, invitant les participants à s’inspirer de la nature pour concevoir des solutions urbaines innovantes. Des représentants du Centre Européen d’Excellence en Biomimétisme de Senlis (Ceebios) – une organisation de référence en France – étaient présents et ont donné le coup d’envoi. La journée a débuté par une introduction au biomimétisme, présentée à Caen par Hugo Bachellier de Ceebios.
“C’est une invitation à réadmirer le vivant”, souligne-t-il avant de présenter les facultés impressionnantes d’espèces naturelles. Par exemple, le lierre sécrète une colle naturelle capable de soutenir jusqu’à une tonne par cm², illustrant comment la nature peut offrir des solutions robustes et innovantes. Cependant, Hugo Bachellier met en garde : “Les bandes adhésives sont inspirées de la fleur de bardane, mais fabriquées avec des hydrocarbures qui ne sont pas biodégradables. Ça n’est donc pas parce que c’est bio inspiré que c’est souhaitable !” Cette nuance est essentielle pour comprendre que l’application du biomimétisme doit être réfléchie et responsable.
De la nature à la ville : les lauréats des Créathons
Chacun des Créathons a révélé des projets innovants, chacun ancré dans l’inspiration du biomimétisme pour relever des défis urbains spécifiques.
À Caen, les participants se sont inspirés de diverses espèces telles que le pissenlit, les oreilles de lièvre, la peau d’éléphant, les fourmis coupeuses de feuilles d’Amérique du Sud, ou encore le xylème des arbres.
Le groupe « Dindon » a développé le concept du « petit château d’eau ». Inspiré du pissenlit qui s’ouvre la nuit pour récolter l’humidité ambiante et se referme le jour pour éviter l’évapotranspiration, ce système de récupération et de redistribution de l’eau de pluie fonctionne de manière autonome. Une cuve s’ouvre et se remplit par temps de pluie. Une pomme de pin placée dans la terre à la sortie de la cuve permet d’évaluer la sécheresse du sol. Si la terre est sèche, la pomme de pin se recroqueville et laisse passer l’eau dans les plantations; si le sol est humide, la pomme de pin gonfle et bloque naturellement la sortie de l’eau, la maintenant stockée dans la cuve.
À Bordeaux, les projets ont également été variés et ambitieux. Les participants se sont inspirés du cactus, de l’italian ryegrass (une plante dépolluante), de la mycorhize (association symbiotique entre des champignons et les racines des plantes), des feuilles et du lombric.
Le groupe « Les Éclaireuses » a développé le concept de « voiries perméables ». Inspirées par les feuilles qui distribuent l’eau et les nutriments grâce à un réseau dense de nervures résistant aux chocs, leur idée était de relier les espaces verts existants par des corridors écologiques végétalisés. Ces corridors auraient un sol en terre recouvert d’un grillage pour le rendre résilient aux passages fréquents des piétons.
Pour conclure, les Créathons de Caen et Bordeaux ne se contentent pas de stimuler la créativité des participants; ils offrent une véritable plateforme pour la mise en place de projets concrets. Grâce à un jury dédié, quatre projets lauréats ont été sélectionnés à la fin de chaque événement. Ces projets bénéficient ou bénéficieront ensuite d’un accompagnement intensif pendant trois mois, incluant des sessions de coaching collectives et individuelles. En espérant que ces initiatives se poursuivent et inspirent d’autres organisateurs à développer des événements similaires, pour une plus grande implication des citoyens et de la jeunesse.