En Suisse, deux hôpitaux se font livrer par drone
La poste suisse et une start-up californienne se sont associées pour développer un moyen de transport innovant par drone. Il permet à deux hôpitaux suisses à Lugano d’échanger facilement des échantillons de laboratoire. Si Amazon, UPS et bien d’autres se sont cassés les dents sur la livraison par drone en zone urbaine, ce projet pourrait bien débloquer les choses.
Un partenariat entre Suisse et Californie
C’est une première : des drones seront désormais utilisés par deux hôpitaux suisses de la ville de Lugano pour s’échanger de petits colis. Si les drones se sont largement démocratisés ces dernières années, leur usage à but commercial en ville a toujours posé problème pour des raisons évidentes de sécurité.
Le partenariat entre la Swiss Post et la start-up californienne Matternet a été initié en 2015 et depuis le prototype a été testé sur plus de 70 vols entre les deux hôpitaux de Lugano. Les essais ont été réalisés en coopération avec l’Office Fédéral de l’Aviation Civile suisse (OFAC), les premières autorisations ont été délivrées et Swiss Post envisage la mise en place d’un service régulier en 2018. D’ici là, des autorisations supplémentaires seront nécessaires pour le transport de sang ou de produits à risque biologique.
Le casse-tête de l’espace aérien urbain
En février dernier le leader mondial de la livraison de colis UPS publiait une vidéo annonçant la mise au point d’un système de livraison hybride grâce à un camion équipé d’un drone. Ce dernier est capable de prendre son envol depuis son camion-base, d’aller livrer un paquet de façon autonome et de revenir se poser sur le véhicule. Un système particulièrement adapté aux zones rurales, mais qui s’avère compliqué à exploiter en ville à cause de la complexité du parcours et la multiplication des obstacles. Ainsi plusieurs géants du e-commerce et du transport se sont essayés à la livraison par drone à domicile dont l’américain Amazon ou l’allemand DHL, mais sans véritable succès en zone urbaine. Le succès de Matternet est d’avoir réussi à dépasser l’obstacle de la livraison à domicile par un système de bases fixes. De cette manière les trajets sont simplifiés et optimisés à l’avance pour éviter les zones à forte densité.
Prise de sang à vol d’oiseau
Cette petite révolution fait gagner du temps au personnel, mais aussi du temps de transport en évitant la circulation. Vendu à des entreprises et non des particuliers, la prise en main de l’appareil est volontairement la plus simple possible. Il suffit de placer le drone et son chargement sur une petite base de décollage et d’appuyer sur un bouton depuis la companion app : le parcours est automatisé et la base émet un signal infrarouge qui assure un atterrissage de haute précision. Outre une formation de base, il n’y a donc pas besoin de pilote, ce qui libère du personnel pour d’autres tâches. Selon Matternet, un drone peut voler jusqu’à 36km/h, sur 20 km. La compagnie explique qu’en matière de transport et de livraison, 90% des biens font moins de 2kg sur le dernier kilomètre, ce que le drone est capable de prendre en charge. Si le transport d’échantillons médicaux est une formule idéale car légère pour un lancement, une telle innovation a donc un très fort potentiel de développement dans d’autres domaines.
Au-delà du champ de vision
Le président et co-fondateur de Matternet Andreas Raptopoulos s’est félicité de ce premier succès : « c’est une étape majeure pour nous. Cela veut dire que nous pouvons exploiter notre technologie à travers toute la Suisse. C’est une vraie opportunité dans le domaine médical et le e-commerce ». Un point crucial a été l’obtention d’autorisation pour le vol des appareils “au-delà du champ de vision”. En effet, c’est la barrière à laquelle se sont heurtés les différents projets de développement de la livraison par drone en zone urbaine. Car la livraison par drone n’est pas une nouveauté, en 2016 un programme gouvernemental au Rwanda a permis la livraison de médicaments par drone. En Allemagne également, DHL a développé un service similaire à Juist, une île isolée de la Mer du Nord. Mais toutes ces expérimentations avaient lieu dans des territoires peu densément peuplés.