Seniors & mobilité : des dispositifs pour améliorer des déplacements difficiles
Le monde vieillit. L’OMS estime que d’ici 2050, on comptera près de 2 milliards d’habitants plus de soixante ans sur notre planète. Ce sujet concerne évidemment aussi les villes, qui devront évoluer à mesure que leur population prend de l’âge. C’est pour ça qu’il nous passionne.
Nous avons d’ailleurs déjà abordé la question récemment, par le biais strictement sociologique, mais aussi par le biais des politiques urbaines qui devront nécessairement être prises. Aujourd’hui, nous nous penchons sur une sélection d’innovations mobiles destinées aux seniors…
Japon : ni vieux ni maîtres en milieu rural
Commençons par le Japon, terre s’il en est de seniors, où les plus de 65 ans représentent un large quart de la population. L’archipel est certes hyper-urbanisé, et les technologies d’accompagnement des personnes âgées – la “révolution robotique” voulue par les gouvernements de Shinzo Abe va dans ce sens – y sont plus répandues qu’ailleurs dans le monde. Cependant, à ce jour, environ 10% des Japonais vivent en milieu rural. Les seniors représentent une part importante de ces résidents ruraux. La question des déplacements pendulaires en zone urbaine est particulièrement importante, à un âge où les besoins médicaux impliquent la visite régulière de spécialistes et où il n’est plus aussi facile d’effectuer de longs trajets en voiture individuelle…
Pour pallier ce problème, l’Etat Japonais a mis à l’essai un service de bus autonomes à destination des habitants les plus âgés de l’ancienne commune rurale de Nishikata – aujourd’hui fusionnée à la ville de Tochigi. Six personnes peuvent ainsi voyager en toute indépendance du village vers différents services de la ville la plus proche. La solution fait ses preuves, et il y a donc des chances pour que d’autres lignes de bus autonomes soient mises en place pour désenclaver davantage de zones rurales nippones…
Plus de permis, cercueil gratuit
Restons au Japon avec ce deuxième exemple. Comme dit plus haut, l’un des principaux problèmes que soulève la question des mobilités des seniors est le fait qu’il leur est de plus en plus difficile de prendre la route en toute indépendance. Dans l’archipel, c’est même devenu une affaire d’Etat, puisqu’en novembre 2016, le premier ministre Shinzo Abe a réuni un groupe de travail pour se pencher sur les accidents de la route causés par les personnes âgées, une “affaire urgente” selon ses dires.
Aussi, dans le courant de l’année 2017, on a vu fleurir plusieurs initiatives – publiques comme privées – pour encourager les personnes du troisième âge à abandonner leur permis de conduire. Tarifs de taxi préférentiels, forfaits de transports en commun spéciaux, bons de réduction pour différents services du quotidien… La proposition la plus surprenante – et la plus morbide – à ce jour est en place dans la préfecture d’Aichi, où une entreprise de pompes funèbres offre une réduction de 15% sur ses services à toute personne ayant abandonné son permis. Tout est bon pour effectuer son dernier voyage dans les meilleures conditions…
La traversée du temps au-delà des écrans
Enfin, notre dernier exemple vient du Brésil. Le concept est simple : dans nos sociétés hyperconnectées, les jeunes (et moins jeunes) urbains ont le nez collé à un écran (fixe en situation de travail, mobile en situation de… mobilité). Or, cette pratique généralisée peut se révéler dangereuse dans certaines situations : parfois trop captivés par la vidéo ou l’article que l’on est en train de regarder, nous sommes moins attentifs au monde alentour… Et un accident est très vite arrivé ! C’était sans compter sur ce service de traversée de la chaussée en toute sécurité : une personne âgée, non connectée, se positionne à vos côtés sur le trottoir, et vous tient par le coude, vous assurant un passage tout en douceur. Vous pouvez continuer à lire votre écran, papy et mamie s’occupent du reste.
De fait, cette pirouette retournant le classique coup du scout qui aide la mémé à traverser la route est une opération de communication d’un distributeur de biscuits local (le marketing est plus fort que tout…). Outre le sous-texte un poil moralisateur sur la déconnexion d’une frange de la population, plus attirée par les écrans que par les “vraies” relations humaines, l’idée d’un tel service est intéressante. En plus de la sécurité routière, il permettrait de recréer du lien social, et de désisoler une partie de la population plus fragile : les personnes âgées.
Les initiatives pour rendre les déplacements plus ergonomiques et plus simples, que ce soit dans les villes ou entre les villes, vont devoir prendre de plus en plus compte de la donne senior, et ce le plus rapidement possible. Car après tout, les jeunes d’aujourd’hui sont les vieux de demain, et ils seront bien contents de trouver des solutions de mobilité adaptées à leurs besoins !
Thomas Hajdukowicz