Repenser le stationnement, un enjeu pour les villes durables

Repenser le stationnement des villes durables
23 Juin 2020 | Lecture 6 minutes

Pour répondre aux enjeux climatiques, les villes de demain se doivent de repenser l’usage de la voiture sur leur territoire. La question du stationnement, notamment de surface, pose alors un problème : comment concilier les besoins des automobilistes avec l’obligation de dégager de l’espace pour permettre le développement des mobilités douces ?

La place de la voiture en ville est un sujet qui prend chaque année davantage d’ampleur en raison des impacts écologiques et sanitaires des émissions de gaz à effet de serre et de particules fines dont les voitures sont responsables. L’enjeu est évidemment de taille pour l’environnement et la santé avec, en ligne de mire, l’objectif pour les villes durables de proposer des déplacements urbains moins polluants : la marche à pied, l’usage du vélo, des EDPM ou encore des transports en commun.

Et s’il est probable que nous puissions voir émerger à l’avenir des villes sans voitures, la problématique actuelle consiste surtout à rééquilibrer l’usage de l’espace public en accordant davantage de place à d’autres moyens de transports. Et pour cela, les places de stationnement sont en première ligne. D’où l’urgence pour les villes en transition de repenser le stationnement des voitures.

LES VILLES RÉDUISENT LA PLACE ACCORDÉE À LA VOITURE

En effet, de plus en plus de villes, de toutes tailles, commencent à repenser l’organisation de leur espace public pour favoriser les mobilités “douces”. Ce qui signifie la mise en place de zones et de rues piétonnes ; de ZFE (zones à faibles émissions) pour limiter l’accès aux véhicules les plus polluants ; de pistes cyclables et d’offres de transports en commun. C’est par exemple ce qu’a réalisé la ville de Madrid récemment. La capitale inspire d’ailleurs le gouvernement espagnol qui pourrait envisager à l’avenir de restreindre l’usage de la voiture dans les villes de plus de 50 000 habitants.

Mais pour aller plus vite et contraindre les utilisateurs de voitures à laisser leurs véhicules chez eux, la suppression des places de parking est un moyen qui a fait ses preuves. Modèle européen de cité sans voitures, la ville espagnole de Pontevedra est notamment passée par là, en limitant le nombre de places de stationnement et en mettant en place un système d’amendes dissuasives pour les contrevenants. De la même manière, Oslo a supprimé près de 700 places de parking ces dernières années, y compris pour les voitures électriques. Sur ces nouveaux espaces, la municipalité a installé du mobilier urbain, des pistes cyclables ou encore des places de parking… pour vélos.

Car c’est là l’autre problématique. Pour développer des transports propres, il faut reconquérir l’espace laissé à l’automobile. À Paris, on estime par exemple que 50% de la voirie est réservée aux usages automobiles, dont presque 10% pour les places de parking.

Mais supprimer les possibilités de stationnement apporte également sa part d’externalités négatives puisque moins de place implique de plus grandes difficultés à se garer, ce qui a un impact direct sur la qualité de l’air. Dans les principales villes européennes, on estime déjà que la recherche d’une place de parking représente 10% du trafic global, et cela peut monter à 25% dans les métropoles.

Pour cohabiter, l’enjeu est donc de trouver des solutions de mobilités qui permettent de faciliter le stationnement tout en en diminuant l’importance dans l’espace public.

Jay Mantri - Pexels

Jay Mantri – Pexels

DES STARTUPS AU SECOURS DU STATIONNEMENT

Il existe à ce sujet de plus en plus de jeunes entreprises innovantes qui travaillent notamment avec avec des bailleurs sociaux et des collectivités locales afin de repenser l’avenir du stationnement en ville.

Afin de s’ancrer dans le développement de villes aérées, végétalisées, piétonnes, et faisant la part belle à l’intermodalité et aux transports doux, ces entreprises dessinent l’avenir du stationnement autour de deux grandes tendances : la mutualisation des places et l’assistance au parking. Deux tendances qui s’appuient sur une philosophie de partage et sur un usage des nouvelles technologies.

Côté assistance au parking, l’offre consiste principalement à guider les automobilistes vers des places disponibles grâce à une application mobile et des capteurs connectés installés sur les places de stationnement. C’est ce que proposent des acteurs comme ParkingMap ou encore Easypark. Des dispositifs qui permettent de faire gagner du temps aux automobilistes et qui, de fait, permettent ainsi de réduire le temps passé à la recherche d’une place.

De l’autre côté, des entreprises comme Zenpark travaillent davantage sur la notion de  mutualisation des places de parking. Une idée qui s’inscrit dans la dynamique des économies du partage et de la fonctionnalité. L’idée principale de ces structures, c’est notamment d’utiliser les places de parkings des bureaux ou encore des hôtels, complexes sportifs, etc. En effet, le parking d’un bureau est rempli en journée, mais totalement vide la nuit, par exemple. La mutualisation permet d’optimiser le remplissage en se basant sur la technologie.

Ici aussi, capteurs, algorithmes et applications mobiles sont nécessaires pour augmenter les taux de remplissage. La startup travaille aussi à améliorer le taux d’occupation des parkings souterrains. Pour William Rosenfeld, co-fondateur de la startup, ce sont 5 millions de places de parking qui sont disponibles en France dans les parcs privés, et qui sont peu ou mal utilisées”. Un constat partagé par la startup Yespark qui propose des solutions de parking souterrains partagés et dont l’objectif est que la disparition des places en voirie sur les prochaines années puisse ainsi se faire en douceur pour les automobilistes.

PAS DE PARKING, PAS DE BUSINESS ?

Théorisé dans les annés 1950 par les pionniers de la grande distribution, dont le colombien Bernardo Trujillo, le dogme du “no parking no business” voudrait que les commerces ne puissent pas survivre à un monde où les automobilistes ne peuvent pas se garer n’importe où, tout le temps.

Cependant des exemples récents prouvent le contraire et qu’il est tout à fait possible de dynamiser commercialement un centre-ville qui serait majoritairement piéton. C’est par exemple le cas de Strasbourg qui, en piétonnisant l’hypercentre et en favorisant les modes de déplacements doux, a permis de maintenir une vitalité commerciale. C’est aussi le cas à Pontevedra, qui a gagné en dynamisme depuis que les voitures n’y circulent plus. La municipalité fait notamment état dans ses bilans d’une augmentation de la population en centre-ville d’au moins 12 000 personnes ces dernières années.

Il en va de même pour la ville de Gand, en Belgique, qui a produit un nouveau plan de circulation en 2017. Une initiative qui décompose la ville en district et qui rend presque impossible, en voiture, le passage d’un district à l’autre autrement qu’en empruntant un boulevard périphérique. Si cette politique a permis de réduire de 12% le nombre d’automobilistes en période de pointe, elle porte aussi ses fruits en matière de développement économique. D’après une étude d’impact réalisée par la ville, le nombre de commerces a augmenté de 20% et le nombre de faillites a diminué de 7% entre 2017 et 2018.

Par ailleurs, une étude menée récemment dans le centre de Londres montre que les marcheurs dépensent en moyenne 150 € de plus par mois dans les commerces que ceux qui se déplacent en voiture.

De fait, repenser le stationnement est un enjeu majeur pour le développement des villes durables afin de permettre le développement des mobilités douces et améliorer la qualité de l’air. Mais il s’agit ici également d’un enjeu pour pour améliorer la qualité de vie des citadins grâce à la diminution de la pollution sonore et à un espace public élargi pour les piétons.

D’autre part, des solutions existent pour permettre de maintenir une certaine activité automobile essentielle à nos activités, notamment nos activités économiques. Cela nécessite de rééquilibrer évidemment l’espace accordé aux voitures. Mais aussi, et surtout, de repenser notre usage de la voiture afin qu’il devienne, à terme, plus exceptionnel que systématique.

À l’évidence, cela nécessite cependant de repenser la dimension sociétale de l’usage de la voiture afin de permettre à tout le monde de pouvoir se déplacer si besoin : services d’urgences, livraisons, personnes à mobilité réduite, femmes enceintes, etc. Ici aussi, la mobilité urbaine de demain fait face à un beau défi : se réinventer de manière inclusive et respectueuse de l’environnement.

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Vos réactions

Massé
27 juin 2020

Toujours le même problème en France où l’espace public est confisqué par le particulier,
Pas de garage pas de voiture, rendons la rue à sa fonction première :circulation uniquement
Cordialement
Pascal

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