Réenchanter nos entrées de ville
Il était une fois une ville qui cherchait à matérialiser ses entrées par des gestes architecturaux forts, soignés, prenant la forme de « portes ». Mais les fées « expansion », « consommation » et « voitures » passèrent par là et modifièrent considérablement le paysage de ces entrées de ville. Loin d’être totalement un conte, voilà comment on pourrait résumer la situation que connaissent actuellement nos entrées de ville, ce que les journalistes et Vincent Remy ont résumé par cette formule « comment la France est devenue moche ». Alors comment modifier ce paysage urbain ? Comment réenchanter nos entrées de ville ?
Une France uniforme et monofonctionnelle
En traversant la France de grandes villes en grandes villes, on s’aperçoit rapidement du manque de variété de l’urbanisme de nos entrées de ville. Que l’on arrive à Nantes, Rennes, Clermont-Ferrand ou Bastia, le schéma est rigoureusement identique : large voie automobile cernée de part eu d’autre par des box abritant d’indispensables enseignes commerciales. Ajoutez à cela la multitude de panneaux publicitaires permettant de vous guider dans vos envies de consommation et vous aurez la structure parfaite d’une entrée de ville.
La prise en compte de cet urbanisme abusif dans nos entrées de ville ne date pas d’aujourd’hui, mais les réelles actions mises en place pour enrayer le sabotage de ces entrées sont encore peu présentes, voire inexistantes. Le manque de dialogue entre pouvoir public et sphère privée (entre le code du commerce et code de l’urbanisme) est en effet préjudiciable à l’organisation et à la vitalité de nos territoires. Car évidemment, cette vision des années 60-70 a montré ses limites et génère de nombreux problèmes. Ces zones monofonctionnelles sont non seulement inesthétiques, mais aussi inadaptées à une ville durable. Engorgées le jour, ces entrées de ville se vident la nuit et le dimanche venus, quand nos magasins préférés ferment leurs portes.
A ce manque d’optimisation de l’espace s’ajoute le problème de la vacance commerciale. Les crises économiques et l’avènement de la consommation digitale ont eu raison de certains de ces commerces et en menacent des centaines d’autres. Ainsi se retrouve-t-on avec de plus en plus de boîtes vides et inoccupées. Alors, pourrait-on considérer cette vacance commerciale comme une opportunité pour un développement plus durable de ces zones ?
La vacance commerciale : une opportunité à saisir
La gestion de l’évolution de la ville ne peut se faire sans la prise en compte des ressources déjà existantes. Les surfaces vacantes présentes sur le territoire sont nombreuses et doivent être réinvesties et optimisées. Pour son Projet de Fin d’Études, Mathieu Michaud, étudiant en deuxième année de cycle master Ville durable à L’École de design Nantes Atlantique a étudié la problématique de cette vacance commerciale à une entrée majeure de la ville de Nantes : la route de Vannes. Alors que nombreux opérateurs immobiliers projettent déjà d’ambitieux programmes d’habitations ou de complexes commerciaux flambant neufs à la place de ces hangars, il paraît intéressant d’observer la capacité de ces bâtiments à pouvoir muter aussi bien dans leurs architectures que dans les usages. Mathieu a donc choisi de s’intéresser à l’un de ces hangars vides pour le transformer en un lieu d’échanges et de partages entre les véritables usagers quotidiens du quartier : les commerçants de la zone et les habitants voisins. Cette halle, gérée par une association de quartiers, proposerait en effet des espaces de ventes totalement modulables à destination de commerçants locaux, mais aussi des espaces libres, complètement utilisables par les habitants du quartier pour effectuer des animations en tout genre, ainsi qu’un bar/cafétéria qui permettrait d’animer le lieu tout au long de la journée jusqu’à tard dans la nuit selon les manifestions organisées, estompant ainsi la vacance pendulaire.
Pour Mathieu, « ce type de réaménagement peut tout à fait être répété sur l’ensemble d’une zone telle que celle de la route de Vannes et, ainsi, transformer radicalement l’image que l’on peut en avoir. Ces entrées de ville ne seraient plus alors un corridor marchand, goudronné et imperméable à son tissu urbain environnement, mais bien un véritable lieu de vie, vert et ouvert sur la ville ».
Par Zélia Darnault, enseignante à L’École de design Nantes Atlantique.