Prendre de la hauteur : les toits dans la ville durable
Et si la ville durable se pensait par le haut ? Aujourd’hui, dans de nombreuses villes, l’espace au sol apparaît presque saturé, et l’étalement urbain a depuis longtemps montré ses limites. Alors, pour penser nos villes de demain, reste la solution d’investir nos toits. Il n’est pas là question de pousser toujours plus loin le gigantisme qui a fait la réputation de certaines villes comme Dubaï, mais bien d’imaginer de nouveaux usages sur ces espaces à potentiels. Alors, prêts à prendre de la hauteur ?
Une indispensable prise de hauteur
Investir les toits semble être une véritable opportunité pour la ville durable. D’ailleurs, certains toits sont déjà utilisés en ce sens : création d’énergie solaire, récupération d’eau de pluie, support pour une éolienne… Nos toits sont d’ores et déjà des acteurs à part entière de la transformation énergétique des villes.
Mais aujourd’hui, les réflexions vont plus loin : il ne s’agit plus d’envisager ces espaces comme de simples espaces fonctionnels mais bien comme de véritables lieux de vie. La réflexion commence à gagner certaines communautés dont les membres se rassemblent pour créer des jardins partagés ou encore des parcs en hauteur.
Pourtant, si le potentiel des toits n’est plus à démontrer, la législation et l’accessibilité demeurent un frein afin d’envisager ces lieux comme réellement novateurs, voire comme de nouveaux espaces publics. C’est là que le designer peut intervenir. En proposant des usages et en les traduisant en projets potentiels, le designer peut donner à réfléchir et à envisager les toits autrement. Et c’est précisément à cette tâche que se sont employées Emmanuelle Pajot et Marie Xambo, étudiantes en deuxième année de cycle Master Ville Durable à l’École de design Nantes Atlantique, pour leurs projets de fin d’études respectifs.
Vers de nouveaux usages
En analysant les typologies des toits à Nantes, Emmanuelle Pajot a pu remarquer de nombreux potentiels de projets. Car, avec les aléas de la construction et de la reconstruction des villes, des espaces vacants apparaissent, ce qu’Emmanuelle a appelé les « dents creuses aériennes ». Ces espaces aujourd’hui vides de toutes fonctions pourraient constituer à terme de véritables opportunités de développement. Car, dans les immeubles qui jouxtent ces dents creuses, nombreux sont les besoins et demandes : de l’espace supplémentaire de stockage, des lieux de rencontres pour échanger avec ses voisins, des terrasses ou un espace vert pour les enfants…
Alors, pourquoi ne pas imaginer que ce toit vide soit le support d’une nouvelle construction dédiée à ces besoins ? C’est ce qu’a proposé Emmanuelle avec son projet intitulé « L’annexe », une micro-architecture qui remplirait les fonctions d’espace de vie commun et partagé, d’espace de travail, d’espace de stockage, de salle de jeux ou encore de terrasse commune.
Des points de vue privilégiés
Pour Marie Xambo, le toit peut être utilisé pour renouveler la balade urbaine. Car le potentiel poétique et les points de vue privilégiés qu’offre le toit ne sont plus à démontrer. En revanche, l’idée de créer un espace public à cet endroit, dans un but de valorisation et d’intensification urbaine semble encore peu présente dans les esprits. C’est à cet usage que Marie a pensé en proposant son concept « E.BOX » : une micro-architecture en bois, autonome en énergie grâce à la présence de panneaux solaires et d’éoliennes, adaptable et modulable selon les fonctions voulues.
Ainsi, E.BOX peut prendre la forme d’un espace de show-room, d’un lieu de convivialité comme un bar, ou encore d’espaces de repos et de contemplation pour proposer des points de vue privilégiés sur la ville. Avec ce projet, Marie Xambo redéfinit la fonction première du toit et en fait un véritable espace public de promenade et de rencontres.
Ces deux projets amènent à réfléchir aux potentiels du toit, cet espace sous-exploité et pourtant indispensable au développement de la ville durable.
Par Zélia Darnault, enseignante.