Peuplade, la fête des voisins toute l’année
Un réseau social de proximité pour réinventer la vie de quartier. Voilà comment se définit le site Internet Peuplade, relancé le 8 septembre dernier, après une première vie au début des années 2000. Rencontre avec Grégoire Éven, qui pilote le projet.
Quel est l’objectif du réseau social Peuplades ?
Nous sommes animés par une philosophie humaniste, une philosophie du partage. Je pense que le mieux-vivre ensemble au quotidien est vital. En tant que citoyens, nous avons tous un rôle à jouer, nous sommes tous acteurs de la société. Nous ne pouvons pas vivre sans prendre en compte ceux qui nous entourent. Au départ, la question, c’est donc : comment le numérique peut accompagner la création de lien social dans les quartiers ? Le numérique participe à une première prise de contact entre les individus, parfois plus simple que dans la vraie vie. Il y a quelques années, on pouvait parler ou rencontrer plus facilement des gens qu’on ne connaissait pas. C’est plus difficile aujourd’hui. Le digital permet de briser cette glace, qui peut-être fine, mais néanmoins dure à percer. Avec Peuplade, la rencontre se passe toujours : qui, dans mon quartier, veut aussi partager sa vie de quartier ? Nous ne sommes pas dogmatiques, nous ne disons pas qu’il faut à tout prix aimer ses voisins, mais Peuplade est une fenêtre, un connecteur. Aujourd’hui, on peut déjà découvrir les centres d’intérêts des « peupladiens », et demain, ça sera au tour de leurs compétences.
Que défendez-vous ?
Nous pensons que Peuplade participe à l’amélioration du lien social dans la vraie vie. D’autres réseaux dits « sociaux » contribuent à l’isolement de certaines personnes, à l’oubli de soi. Nous voulons vraiment qu’il y ait un dialogue continu entre les peupladiens et avec eux. Mila Colas, notre community manager, nous fait justement remonter les besoins de notre communauté.
Vous lancez en fait une V2 de Peuplade, qui a déjà eu une première vie sur Internet…
Oui, le site a été lancé en 2003. Il ressemblait alors à un grand forum avec des groupes de discussion et des petites annonces. Il a presque disparu en 2010, mais ses fondateurs désiraient poursuivre l’aventure. Ils m’ont proposé de relancer Peuplade. La phase de test a duré cinq mois à Paris, Marseille et Grenoble. L’idée était de tester le besoin du grand public d’avoir, ou pas, une vie de quartier. Nous avons eu un super accueil ! 3000 personnes se sont inscrites, ce qui est bien pour un réseau social de cette taille. Nous voulions aussi tester quelques fonctionnalités très simples. Sur le site, un espace permet de créer des rendez-vous de quartier, un autre de pouvoir s’entraider, et chacun peut poser ses questions sur un mur. Mais le vrai challenge, c’était de définir notre vision de la vie de quartier : à quoi se limite mon quartier ? Est-ce que c’est ma ville ? Ma rue ? Notre première proposition était de le circonscrire à 10 minutes à pied de son lieu de résidence, mais les bêta-testeurs nous ont expliqué que c’était trop restreint. Alors nous avons fait évoluer notre proposition mais, là encore, notre communauté nous dit : mon quartier de résidence est mon « premier » quartier, mais je fais aussi partie d’autres quartiers, entre celui où je bosse ou ceux où je sors le soir. Il nous reste donc encore beaucoup d’évolutions à faire.
Le XXe arrondissement de Paris est l’un de ceux qui rassemblent le plus de peupladiens. Comment l’expliquer ?
Le XXe est un arrondissement où la vie de quartier est plus forte que dans d’autres quartiers, moins denses et plus résidentiels. C’est aussi un quartier de divertissement, avec de nombreux bars et boîtes de nuit. Amine Sadry, notre développeur, vit dans le XIXe, Mila, notre community manager, est à Belleville et j’habite à Père Lachaise. Donc forcément, nous connaissions le coin et les commerçants, et nous avons pu y organiser plusieurs évènements pour le lancement de Peuplade.
Combien y a-t-il de peupladiens aujourd’hui ?
Nous en sommes à 5 200 membres, nous avons pour objectif d’atteindre 20 000 peupladiens d’ici à la fin de l’année. Nous allons actionner différents leviers pour parvenir à ce chiffre. Tout d’abord, nous comptons sur notre communauté, pour qu’elle-même vienne chercher d’autres membres, comme tout bon réseau social. Ensuite, nous allons mettre des éléments de communication sur nos réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Tumblr) et nous aimerions réaliser des publicités un peu décalées sur Facebook, susceptibles de ramener de la communauté.
Vous êtes-vous inspirés de ce qui se fait à l’étranger ?
Il y a un site américain qui s’appelle Next Door. C’est un réseau social d’hyper proximité, mais qui est sur un positionnement plutôt sécuritaire. Par exemple, comment mon voisin va appeler les pompiers si un feu se déclare chez moi ? Comment les voisins vont signaler à la police si un véhicule louche est garé devant l’école de mes enfants ? Les autorités publiques sont partenaires de ce site. En France, tous les sites de l’économie collaborative sont hyper ancrés localement. Avec Peuplade, nous nous situons à la frontière entre le partage et la rencontre, mais nous ne sommes pas une market place.
Y aura-t-il une appli Peuplade ?
Nous le souhaitons. Pour l’instant, nous sommes un site en responsive design car nous ne voulions pas faire une appli directement. Tout le monde n’a pas de smartphone ou n’est pas familier des applis. Nous voulons aussi faire évoluer notre site, ce qui est plus facile à faire qu’une appli, plus lourde à mettre en place techniquement. Il faut aussi des validations de la part d’Apple Store ou d’Android. Créer un site nous permet plus d’agilité dans un premier temps.
Comment le projet est-il financé ?
Peuplade est détenu par une SAS qui s’appelle Les ingénieurs sociaux, créée par les fondateurs du réseau social. Ses financements suffisent pour l’instant. Mais quand nous irons sur un développement applicatif, il faudra alors réfléchir à des levées de fonds.