Le parc olympique de Londres : un modèle de réversibilité ?
Sept étudiants de l’École urbaine de Sciences Po ont étudié l’héritage des Jeux olympiques de 2012 à Londres, à partir de recherches bibliographiques et d’enquêtes de terrain. Qualifiées de « meilleurs Jeux jamais organisés » par le président du CIO Jacques Rogge, ces olympiades sont souvent saluées pour leur héritage urbain. Elles se sont inscrites dans un projet global de régénération de l’Est londonien, et plus précisément du quartier défavorisé de Stratford, dans le borough de Newham. Cinq ans après, la reconversion de Stratford est-elle réussie ?
Réversibilité et héritage au cœur de la candidature olympique
Contrairement aux Jeux d’Athènes, ceux de Londres ont été pensés dès l’amont comme un moyen de redéveloppement urbain. Le projet s’inscrivait dans un programme de redynamisation de l’East End londonien initié depuis les années 1980. Avec des habitants à faibles revenus (17,6 % d’adultes non qualifiés dans les Growth Borough dont Stratford fait partie, contre 11,6 % à Londres) et des friches industrielles, le quartier de Stratford était l’un des plus démunis de la capitale.
L’objectif était de lancer une dynamique positive en le désenclavant et en développant les retombées économiques pour les habitants. L’ambition de régénération urbaine s’est concrétisée par la dépollution du site et la conception d’un parc olympique reconvertible en quartier urbain mixte intégrant un grand parc public. Le projet, confié à trois agences principales, s’appuyait sur un large recours aux partenariats public-privé.
Une reconversion technique réussie
Cinq ans après, le bilan technique de la reconversion est positif. Les équipements ont été conçus pour évoluer, par exemple avec des gradins temporaires et des structures modulables, voire démontables. Aujourd’hui, les cinq équipements sportifs pérennes (centre aquatique, stade olympique, Eton Manor, Lee Valley VeloPark, Copper Box Arena) sont ouverts au public et les trois équipements temporaires ont été démontés.
La capacité d’accueil du stade olympique a été réduite de 80 000 à 50 000 places grâce à des tribunes rétractables. L’ancien village olympique et le centre des médias sont reconvertis en logements et en espaces pour les entreprises. Grâce à des murs destructibles intégrés dès l’origine dans les appartements, le village olympique accueille désormais 3 600 logements. Certains ponts, construits pour faciliter les déplacements des visiteurs pendant les J.O., ont été démontés pour s’adapter aux nouveaux flux.
Un bilan nuancé pour les habitants
Si la reconversion est techniquement réussie, le bilan social est contrasté. À l’échelle des boroughs hôtes, le projet cristallise une fracture urbaine entre une population plutôt aisée qui s’étend vers l’est de Londres et une population locale plus précaire, qui subit un processus de gentrification. Les nouvelles infrastructures, la connexion des transports au centre de Londres et la construction de logements plus adaptés aux jeunes ménages londoniens ont attiré de nouveaux habitants qui remplacent progressivement les populations préexistantes.
Ce phénomène aurait pu être limité par un programme plus ambitieux de logements sociaux. La construction du mall de Westfield, le plus grand d’Europe, témoigne de cette fracture. Il est très fréquenté par les nouveaux habitants, alors que les populations historiques se rendent à l’ancien centre commercial. Le modèle du nouveau quartier vient supplanter l’identité passée de Stratford, ce qui relativise l’idée d’héritage placée au cœur de la candidature de Londres.
Pour consulter l’étude complète réalisée par les étudiants, cliquez ici.
Par Sacha Dalis, Alice Duthuillé, Marie Fricaudet, Simon Issard, Adèle Juste, Estelle Martenot, Julien Vincelot, étudiants à l’Ecole urbaine de Sciences Po
Eléments initialement présentés dans l’exposition « Réver(cités), villes recyclables et résilientes » à la Cité de l’architecture & du patrimoine, du 12 octobre au 4 décembre 2016. Plus d’informations dans la visite virtuelle de l’exposition.