Métro bondés : quels remèdes pour de meilleures conditions de transports ?
Avec l’explosion de la population, un phénomène commun s’observe au sein des grandes métropoles : les lignes de métro commencent à saturer. Récemment, des repas ont même été offerts aux usagers japonais qui prenaient les transports à des horaires décalées. Une anecdote qui révèle un phénomène omniprésent dans les grandes villes, celui des métros encombrés à outrance.
Le métro, inauguré pour la première fois à Londres, est le moyen de transport urbain le plus utilisé au monde. Rapide, sans bouchons et non dépendant du trafic routier, le métro est aujourd’hui indispensable dans les métropoles. La raison est simple, il sert chaque jour à se rendre sur son lieu de son travail, à accéder aux aéroports ou encore à visiter une ville. Mais avec la constante augmentation de la population et du nombre d’individus vivant en milieu urbain, l’utilisation du métro soulève de nouvelles problématiques dans les grandes villes, qui viennent directement impacter la qualité de vie des citadins.
Aux heures de pointe, à travers le monde, un grand nombre de métros devienne bondé. Alors ils saturent, venant créer des situations inconfortables pour les usagers, voire presque invivables. Comment les acteurs de la ville réagissent-ils face à cela ? Quelles solutions peuvent-elles être envisagées pour rendre les rames plus confortables et moins encombrées ?
Le métro, un transport urbain identitaire des villes sous tension
Né en 1863 à Londres, le métro fut tout d’abord desservi sur une ligne par des locomotives à vapeur. La transition vers la ligne électrique s’effectuera quelques années plus tard et les premiers wagons électriques verront le jour en 1892. Son développement continue à s’étendre durant la première moitié du XXème siècle, principalement aux Etats-Unis et en Europe. Parallèlement, il est inauguré sur le continent asiatique en 1927, là où une importante croissance se développera.
Aujourd’hui, le métro est devenu le moyen de transport en commun le plus utilisé ; 178 villes possèdent un réseau de métro avec un total de 14 000 km de lignes pour l’ensemble de ces villes. C’est en Asie que son développement fut le plus conséquent, avec aujourd’hui des mégalopoles qui comptabilisent plus de 3 milliards de trajets annuels, comme Shanghaï, Tokyo, ou encore Pékin. Ces chiffres loin d’être anodins, ils révèlent un véritable phénomène de croissance démographique, urbaine et économique. En effet, ce moyen de transport urbain a fortement participé au développement des villes et a joué un rôle majeur dans l’expansion urbaine. Vecteur de développement économique, le métro est à ce jour le transport le plus efficace et le plus rapide pour les déplacements intra-urbains.
Cependant, ce mode de transport présente aussi certaines limites qui peuvent impacter la qualité et le confort des utilisateurs. Avec l’augmentation de la population et du nombre de citadins, les métros des grandes villes connaissent depuis quelques années de véritables problèmes de saturation. Aux heures de pointes, les usagers peinent à circuler au sein des réseaux, ce qui entraîne des situations inconfortables et stressantes. Alors l’usage même le plus simple consistant à se rendre sur son lieu de travail peut s’avérer difficile et extrêmement long.
Rester à quai plusieurs heures, c’est ce que vivent quotidiennement les usagers de la ligne 13 du métro de Pékin, en Chine. Il faut savoir jouer des coudes pour accéder aux wagons de la rame et ainsi éviter d’être bloqué par la marée humaine des heures de pointe.
Certains usagers se voient même obligés d’opter pour des stratagèmes étonnants : à New York, notamment à Brooklyn, des passagers décident de remonter les lignes dans le sens inverse pour espérer avoir une place et en évitant ainsi les stations sur-bondées où se massent les passagers.
Anticiper les heures de “rush”, c’est également une des pratiques utilisées par de nombreux travailleurs qui arrivent alors plus tôt aux stations pour éviter le trafic trop dense des heures de pointe. La ligne 13 de la capitale française, souvent décriée et désignée comme “insupportable” par les usagers, fait également partie des métros les plus bondés où les citadins se retrouvent obligés de s’adapter pour passer un trajet avec le moins d’encombres.
Les villes délivrent leurs secrets pour désengorger le métro
Les municipalités, les acteurs de la ville et les professionnels de la mobilité l’ont bien compris, les métros sont bien au bord de la saturation, ce qui représente un risque puisque ces situations inconfortables sont sources de stress et de fatigue pour les passagers mais que cette affluence est également source de conduites dangereuses, notamment lorsque des foules se concentrent sur les quais. Pour remédier à ces menaces, de nouvelles méthodes sont recherchées pour alléger les flux d’usagers. Parmi elles, des solutions innovantes, des reports vers d’autres mobilités… toutes les méthodes sont bonnes pour proposer des solutions et améliorer les conditions de transports dans les lignes les plus touchées par ce phénomène.
Ainsi, des solutions innovantes voient le jour pour limiter l’affluence dans les transports. Les services de transport rivalisent ainsi d’ingéniosités pour que les rames puissent accueillir le plus d’usagers possibles. Parmi ces solutions, les acteurs de la mobilité aménagent les rames des métros de sorte à ce que les sièges prennent le moins de place possible lors de fortes affluences. Plus ingénieux encore, alors que la ligne Tozai, qui dessert Tokyo d’Est en Ouest, est régulièrement inondée de monde aux heures de pointe, la capitale a décidé d’offrir un repas aux voyageurs qui acceptent de partir plus tôt. Une initiative qui permet de réguler les flux tendus, un défi logistique majeur pour Tokyo qui compte accueillir les Jeux Olympiques en 2020 !
Les entreprises s’y mettent aussi, pour faciliter la mobilité de leurs salariés. Dans cette perspective, 13 entreprises de la Défense, comme Engie, Axa ou Allianz, ont expérimenté la modulation des horaires de leurs salariés, en partenariat avec la RATP, la SNCF et IDF Mobilités, afin de mieux répartir les afflux de voyageurs dans les transports en commun. Ils se sont ainsi engagés à réduire le nombre de leur salariés voyageant pendant les heures de pointe les jours de plus fortes affluences comme le mardi et le jeudi. Pour y parvenir, les entreprises promettent de décaler les horaires de leurs salariés ou de ne pas programmer de rendez-vous importants avant 10h ou après 17h. D’autres solutions proposées sont des incitations à utiliser le vélo, le télétravail à domicile ou depuis des espaces de coworking à l’extérieur de l’entreprise.
Par ailleurs, l’émergence de nouvelles mobilités comme l’offre de location en libre-service ou free-floating de trottinettes électriques permet de désengorger les transports en commun ou plus classique, l’utilisation du vélo, facilitée par l’offre de location de vélo mise en place par la ville pour répondre aux déplacements sur de plus courtes distances ou dans une logique de dernier km.
Parmi les nouvelles tendances actuelles, le développement fulgurant du numérique et des outils de télécommunication favorise la pratique du télétravail en plein développement dans les structures professionnelles n’imposant plus aux employés de se déplacer systématiquement. La démobilité peut ainsi être une partie de la solution à la saturation des transports en communs.
Travailler de chez soi est une pratique qui peut s’avérer être bénéfique pour limiter les heures passées dans les transports. Reste encore à trouver un équilibre pour veiller à contourner les problématiques émergentes issues de ce nouveau mode de travail comme l’isolement des travailleurs. Il s’agit aussi de redéfinir les modes de contrôle du temps de travail ou de régulation des charges de travail afin de proposer à l’employé de travailler en dehors d’un bureau dans les meilleures conditions. Le télétravail peut ainsi être une solution partielle pour réguler en partie la quantité de flux domicile-travail.
Inciter à l’utilisation d’autres moyens de mobilité, essayer d’anticiper les heures de pointe, trouver des alternatives innovantes, jouer sur l’intermodalité… Divers acteurs se mobilisent à travers le globe pour lutter contre ce phénomène de saturation du métro. À travers des initiatives locales, ils tentent méli-mélo de répondre à cette problématique qui affecte la qualité de vie, mais ces initiatives ici et là peuvent perdre de leur substance lorsqu’elles se noient dans l’immensité des très grandes villes.
Vers des plans de mobilité à grande échelle pour rééquilibrer les flux
Alors que les spécialistes de la mobilité, les entreprises, les nouveaux acteurs de la mobilité s’y mettent, les municipalités comprennent que leur rôle est d’uniformiser toutes ces actions afin de proposer à tous les citoyens une offre de mobilité adaptée à leurs modes de vie. Mais ce travail d’uniformisation est complexe car il concerne plusieurs échelles de mobilité. Avec l’étalement des villes et la densification progressive, de nouvelles villes se consolident pour demander un système de mobilité de plus en plus efficace pour ses nouveaux habitants. Les bassins d’emplois sont divers et les trajets sont plus ou moins long, coûteux, difficiles, congestionnés. Les cas sont si particuliers qu’une seule solution ne peut pas être envisagée pour répondre aux besoins de tous les habitants. Ainsi, des politiques de mobilité imbriquées, à petites et grandes échelles, doivent être créée et facilitée par des outils de mise en œuvre comme Le Plan de Déplacement Urbain en France créé par la loi LOTI (loi d’orientation sur les transports intérieurs), un outil global de planification de la mobilité à l’échelle d’une agglomération permettant de définir les principes d’organisation du transport et du stationnement.
Pour répondre à l’agrandissement des zones d’intervention en matière de mobilité, de grands projets émergent comme le Grand Paris. Ainsi, la métropole a projeté le prolongement et l’agrandissement de certaines lignes pour aider à désengorger certaines zones touchées par la saturation. Véritable réseau en rocade, avec la création de quatre nouvelles lignes de métro et le prolongement de la ligne 14, le Grand Paris Express sera achevé en 2030.
Cet enjeu d’échelle concerne également la région qui dispose de divers leviers, parmi lesquels, des aides à l’implantation d’entreprises en grande couronne permettant de les rapprocher du domicile de leurs employés ou du moins de répartir la mobilité sur des espaces à moindre flux, tout en prévoyant une nouvelle offre de déplacements facilitant celle des employés vivant encore dans d’autres quartiers ou d’autres villes. Ainsi, une solution émise pourrait être l’attribution d’une voie sur les autoroutes dédiées au covoiturage réduisant le coût du transport et incitant à aller vers un mode de transport plus vertueux qui réduit le nombre de voiture sur les routes comme le propose une expérimentation sur 500 mètres entre le Haute Savoie et Genève. Une autre proposition serait d’intégrer des espaces de coworking dans les gares afin de laisser passer les rames bondés et pouvoir travailler tout en attendant une rame de RER non saturée.
Enfin, pour favoriser des modes de déplacements adaptés à tous, les plateformes multimodales devront se multiplier pour permettre à tous les citoyens d’utiliser plusieurs modes de transport au cours d’un même déplacement. D’ici 10 ans, il pourrait également être possible de tarifer à la consommation grâce à l’identification des usagers à l’entrée et à la sortie d’un écosystème de transport facilité par la numérisation des titres de transport et l’évolution de la billettique.
Dans les grandes villes émergentes du continent asiatique, des solutions sont aussi pensées à grande échelle. À Ghanghzou, en Chine, les autorités proposent, depuis 2010, un Bus à Haut Niveau de Service (BHNS) visant à faciliter l’intermodalité et les déplacements pour répondre aux situations de saturation excessives. Ce bus permet de mieux connecter les différents moyens de transports de la ville chinoise : des tunnels relient directement les stations de métro aux stations d’arrêts du BHNS, ces dernières étant également équipées de parkings à vélo et d’une flotte de vélos en libre-service. Ce nouveau transport innovant propose une meilleure connexion intermodale, qui vient directement pallier aux problèmes de saturation. Ainsi, dès son ouverture, ce réseau de BHNS comptait déjà plus d’un million d’usagers chaque jour !
Allant également de plus en plus vers la réduction du nombre de voitures dans les villes, l’espace de circulation libéré permettrait d’augmenter le nombre de lignes de bus et/ou de tramways et de multiplier la fréquence de ces transports en commun permettant ainsi de reporter des déplacements souterrains vers les espaces publics des villes. Cet apaisement des rues pourrait à son tour inciter davantage les citadins à prendre le vélo, la trottinette ou à se déplacer à pieds. Les mobilités de demain seront-elles ainsi moins subies ?