Mes endroits à moi de Gaia Stella, la ville sous l’œil de l’enfant
Comment les enfants voient la ville, ses lieux emblématiques et leurs différentes architectures ? À l’occasion de la présentation de son dernier livre Mes Endroits à Moi publié chez Grasset Jeunesse, Demain la Ville a rencontré l’auteure milanaise Gaia Stella au Salon du livre et de la presse jeunesse à Montreuil. L’ouvrage explore sous forme de voyage les bâtiments favoris d’une petite fille, leur formes, leurs couleurs et leurs imaginaires. De la maison au planétarium, en passant par la bibliothèque et la caserne de pompier, à chacun ses histoires et ses rêves qui permettent de s’approprier la ville.
D’où vient l’idée de ce livre sur la ville ?
La première intention était de dessiner un livre sur la ville et l’architecture. De par mes études de design ce sont des choses auxquelles je suis attentive, mais que l’on transmet peu aux enfants. Il fallait donc trouver une approche qui parle aux enfants. Réussir à exprimer le ressenti d’un enfant sur l’architecture, ramener les concepts à des choses simples et organiques. Une carte ou un plan sont trop abstraits, j’ai voulu mettre l’accent sur l’exploration, donner vie aux matières et aux couleurs. Les bâtiments sont comme des symboles forts. On a beaucoup discuté avec mon agent de comment rendre ça sensible.
D’ailleurs dès la première page le livre s’intéresse tout autant aux objets qui vont de pair avec ces lieux.
C’est un voyage avec les yeux d’Alice, une petite fille. Il faut montrer aussi l’importance du mobilier. Je pense qu’un enfant comprend très facilement l’idée d’une chaise par exemple, c’est l’objet le plus simple à dessiner. Mon objectif ici est de trouver la plus belle chaise possible. C’est une façon de transmettre un ressenti particulier, une émotion. Je suis toujours à la recherche de beaux design et de belles formes.
Les styles des bâtiments sont très variés, comment êtes-vous arrivée à cette sélection ?
Pour faire ce livre je me suis énormément documenté. J’ai regardé les façades célèbres de théâtre ou de bibliothèque dans plein de villes différentes. La sélection qui reste est issue de ce travail d’absorption. Même si les styles sont très variés et convoquent plusieurs époques, il ne s’agit pas d’un bâtiment pioché dans une ville différente à chaque fois. J’ai essayé de faire une synthèse et de trouver certaines marques fortes. Il n’y a que le musée qui est vraiment inspiré d’un seul bâtiment. C’est la seule architecture futuriste, fluide et organique du livre. Il fallait apporter une touche plus douce, moins géométrique que le reste.
Dans le livre l’enfant se promène seul et rêvasse librement, il est très familier avec sa ville, ce qui n’est pas du tout évident dans les grandes villes d’aujourd’hui.
Oui dans le livre Alice fait un voyage en ville, elle se retrouve au théâtre, on devine qu’elle n’est pas seule mais elle parle comme si elle s’appropriait vraiment les choses. Je trouvais ça important de lui donner la parole de cette manière.
Pensez-vous que les villes sont suffisamment aménagées pour les enfants ?
C’est compliqué de laisser un enfant se promener seul bien sûr, les villes ne sont pas vraiment pensées pour les enfants. Seuls les parcs ou les écoles le sont. En Italie il y a eu une polémique récemment car l’Etat voulait imposer aux parents d’enfants de moins de 14 ans d’aller les chercher à l’école. Une loi en vigueur existait déjà mais elle était peu appliquée et la ministre de l’éducation a souhaité la faire appliquer de manière plus stricte. Le débat portait sur la sécurité des enfants et sur l’impossibilité des parents qui travaillent d’aller chercher leurs enfants. Ce sont des réalités, mais finalement on n’a pas discuté de l’importance pour les enfants de savoir évoluer seul dans l’espace public et d’être en confiance. Je ne sais pas ce qu’on pourrait améliorer, peut-être réduire la place de la voiture ?
Pour finir, la maison et l’école sont les deux lieux incontournables de l’enfance, comment se fait-il que l’école ne soit pas dans le livre ?
(Rires) Oui c’est vrai il n’y a pas d’école. L’école a une place très importante dans la vie des enfants, j’ai voulu mettre en avant d’autres lieux. Je voulais trouver des lieux plus instinctifs, moins contraints. Certains enfants n’aiment pas l’école. Alors j’ai choisi des lieux parfois très familiers et d’autres ignorés, on peut passer devant sans les regarder, mais tous portent un imaginaire fort. Je pars du cocon familial avec la maison, pour aller vers l’espace avec le planétarium. C’est un voyage dans les rêves et le quotidien en même temps.
J’aimerai qu’après avoir lu le livre, les enfants aillent voir par eux-mêmes ou demandent à leur parents : « où est la serre ? », « quand est-ce qu’on va au théâtre ? »…
Mes endroits à moi, Gaia Stella – Grasset Jeunesse
En bonus, voici une sélection de trois livres pour enfant sur la ville :
- La ville fourmillante et animée avec New York en Pyjamarama (Rouergue)
- Un fauve quitte sa savane natale pour explorer la Ville Lumière, Un Lion à Paris (Casterman)
- La ville en construction et dépliable avec Popville (Helium)