Les champignons et la ville
Tantôt considéré comme dangereux, tantôt denrée recherchée dans nos assiettes, le champignon cultive un côté ambivalent. On le traque lors de nos promenades en forêt, allant jusqu’à garder secret les coins où on le trouve. Mais en ville, il est vite synonyme d’endroit laissé à l’abandon, sale, ou encore symptomatique des premiers signes de pourrissement et de moisissure. Mais aujourd’hui, certains chercheurs s’intéressent aux propriétés du champignon et s’attachent à en démontrer le potentiel. Alors le champignon peut-il trouver sa place dans nos villes ? Comment utiliser ses bienfaits dans l’espace urbain ?
Une source d’inspiration
Avec son pied allongé et son chapeau alvéolé, le champignon n’est pas que bon à manger, il est aussi beau à regarder. Cet esthétisme particulier et cette forme semblable au parapluie en font un abri parfait. Ainsi, Peyo a choisi le champignon comme lieu de vie et d’habitat pour ses petits êtres bleus, les Schtroumpfs. Le champignon devient alors le symbole d’une protection et d’une symbiose parfaite avec la nature. Et si l’envie de vous prendre pour un Schtroumpf vous titille, nombreux sont les logements insolites en forme de champignons permettant de se ressourcer et de profiter de ses formes apaisantes. Mais le champignon n’inspire pas que les touristes en mal de nature. On peut citer le projet Sand Babel entièrement conçu en impression 3D qui s’inspire structurellement des champignons et tente de trouver des solutions pour vivre en environnement hostile, comme le désert.
Un matériau aux propriétés insoupçonnées
Mais le champignon n’est pas inspirant seulement pour son aspect esthétique. Ses propriétés et son fonctionnement intéressent également les chercheurs. Par exemple, le champignon est capable de capter un grand nombre de nutriments et de se protéger, grâce à un système de racines communicantes et parfaitement développées. Malgré son apparente fragilité le champignon a donc bien des choses à nous apprendre. Ce dernier est également composé d’un matériau particulièrement intéressant : le mycélium. Travaillé et modelé, on peut se servir du mycélium comme d’un matériau à part entière, notamment dans le domaine de la construction. Le studio de design The Living a mis au point une méthode permettant de fabriquer des briques en mycélium qui serviront de base à la construction d’architectures éphémères ou pérennes. Le mycélium apparaît aussi comme une alternative intéressante au plastique, on peut ainsi l’utiliser pour la fabrication de packagings, de mobilier, de lampes… Et le mycélium possède un intérêt non négligeable : il est entièrement biodégradable.
Un dépolluant naturel
Parmi les propriétés du champignon, il en est une qui mérite d’être particulièrement exploitée : sa capacité à être un dépolluant naturel. En effet, le champignon absorbe un certain nombre de polluants et, ce faisant, il devient un allié de taille dans la lutte contre la contamination des sols. C’est cette propriété qui a intéressé Charlotte Blay, étudiante en deuxième année de cycle master à L’École de design Nantes Atlantique. Elle a alors décidé de créer une installation présente au cœur de la ville pour, à la fois, faire prendre conscience de l’impact de l’homme sur les sols et, également, d’entamer un processus de dépollution de ceux-ci. Prenant la forme d’une tour, le projet a également pour but de montrer aux usagers l’importance du sol comme potentiel créateur de vie grâce à la recolonisation végétale. Ainsi, elle entend prouver que le champignon a toute sa place dans nos vi(ll)es.
Par Zélia Darnault, enseignante à L’École de design Nantes Atlantique