Le droit au rez-de-chaussée : pour un renouveau de la vitrine urbaine
Tous les agents immobiliers le savent, notre rapport au rez-de-chaussée est complexe, particulièrement en centre-ville. Lieu privilégié pour les commerces, rares sont les habitants qui ont particulièrement envie de s’exposer au vu et au su des usagers de la rue. Car le rez-de-chaussée urbain s’apparente à une véritable vitrine, à tel point que l’on désigne sous l’appellation « vitrine urbaine » tous les rez-de-chaussée, qu’ils aient une activité marchande ou non.
Qu’il s’agisse de vitrines commerciales, sociales, culturelles ou privées, chaque culture a sa propre manière d’appréhender le rez-de-chaussée. Mais il y a une composante qui demeure : quand le rez-de-chaussée se vide, c’est la rue, voire le quartier, tout entier qui perd de son attractivité. Alors comment faire pour que le rez-de-chaussée continue à fédérer les usagers et à animer les centres urbains ?
Du rez-de-chaussée à la vitrine
La rue revêt bien des aspects et inspire des comportements divers. Elle peut par exemple symboliser un lieu de danger, car c’est le lieu où circule le peuple. Ainsi, à Florence, les architectes des palais cherchent à se barricader de la rue. Le traitement architectural du rez-de-chaussée est alors plus grossier, très peu ouvert sur l’extérieur et plus le regard s’élève plus l’architecture s’ouvre et s’affine. Cela va même jusqu’à imaginer un stratagème pour éviter complètement de passer par la rue : victimes de tentatives de complots et de meurtres, les Médicis font édifier un passage secret passant par les toits de la ville pour pouvoir aller de leur lieu d’habitation à leur lieu de travail sans avoir à passer par la rue. C’est le fameux corridor de Vasari. Avec l’expansion du commerce, les rez-de-chaussée se sont ouverts, on aménage des étals puis de véritables vitrines qui participent de la visibilité des commerces et de l’animation de la rue.
Le rez-de-chaussée : une composante essentielle de la ville marchable
Les vitrines constituent une véritable passerelle entre l’espace public et l’espace privé. Elles sont à cheval entre ces deux typologies d’espace, elles attirent le regard de l’extérieur vers l’intérieur. Et par la même occasion, elles contribuent à donner envie de circuler, de flâner et d’arpenter les rues de nos villes par la marche. La crise sanitaire l’a bien montré : quand les rideaux de fer sont baissés, que les terrasses des cafés sont fermées et que les vitrines peinent à s’animer les centres-villes sont désertés. La vitrine encourage donc les pratiques de villes lentes et doit ainsi compter parmi les composantes essentielles de la ville durable. Elle ne revêt pas qu’une fonction commerciale mais devient un outil social et culturel fort en débordant sur l’espace urbain.
Rendez-vous en rez-de-chaussée !
C’est ce rôle majeur de la vitrine qu’a voulu démontrer Gaëlle Rioual, étudiante en deuxième année de cycle master à L’École de design Nantes Atlantique, pour son Projet de Fin d’Études. Elle s’est intéressée à un quartier dit sensible de Nantes, le quartier Malakoff afin d’expérimenter autour du rôle social de la vitrine. Son projet intitulé « Rendez-vous en rez-de-chaussée » a pour objectif de dynamiser une place nantaise tout en permettant de retisser du lien social entre les habitants. En tant que scénographe de formation, elle a souhaité aborder un îlot urbain dans son ensemble et ne plus traiter les vitrines indépendamment les unes des autres. Elle propose à la place un véritable cheminement et un lien répondant à la fois aux usages commerciaux mais aussi aux usages plus globaux de la rue. Par un traitement de la couleur, des formes et du mobilier urbain, elle entend ainsi redynamiser une place et permettre au rez-de-chaussée de jouer pleinement son rôle de frontage.
Par Zélia Darnault, enseignante à L’École de design Nantes Atlantique
Vos réactions
Bonjour,
Attention ce n’est pas la Place Royale à Nantes mais le côté impair de la rue de la Juiverie.