« L’artiste ne fait pas seul, il travaille toujours avec” : retour sur le Festival Demain la Ville #2

20 Sep 2023 | Lecture 3 min

Peut-on rêver sans art ? Le deuxième Festival Demain la ville, qui s’est tenu à Lyon le 6 juillet dernier, était placé sous le signe du “rêve”. Au programme de l’après-midi, trois tables rondes pour penser la ville autrement. Les échanges avaient démarré par une invitation à écouter les enfants, et déjà s’était posée la question de l’artiste comme médiateur. La deuxième table ronde s’est attelée à creuser ce sujet, avec en ligne de mire une ville plus sensible et partagée.

L’art pour fédérer et construire autrement

Quel meilleur écrin que la Cité des Halles pour aborder ce thème ? Le projet d’occupation transitoire, qui avait déjà accueilli la première édition du Festival, héberge près de 80 artistes et artisans. Certains participaient même aux festivités, à l’instar d’Atelier Coton pour découvrir la sérigraphie ou La Mauvaise Graine pour s’initier aux plaisirs du gin. Co-conçue par UrbanEra (l’aménageur de Bouygues Immobilier), le Groupe Darwin et Akka Studio, la Cité des Halles se veut un “interstice préfiguratif”.

Comme l’explique Orbiane Wolff, fondatrice d’Akka Studio, les artistes et artisans en résidence permettent de tester des usages auprès des visiteurs, usages qui pourront être déployés dans le futur quartier. “Ce lien avec les artistes permet de fédérer avec les habitants, mais aussi de co-construire des projets qui vont au-delà de ce qu’on peut imaginer de manière plus traditionnelle”, détaille Orbiane Wolff.

L’art pour faire interface avec les habitants

Ce rôle de pas-de-côté est au cœur de la pratique défendue par Stefan Shankland, artiste-plasticien et maître de conférences à l’école d’architecture de Nantes.”L’artiste ne fait pas seul, rappelle-t-il doctement. Il travaille toujours ‘avec’, que ce soit avec les professionnels de la transformation urbaine ou les habitants.” Ce lien s’inscrit dans une longue évolution de l’histoire de l’art, estime Loïc Fel, docteur en philosophie et co-fondateur du Prix COAL, un concours artistique international centré sur la transition écologique.

Le doctorant parle de “sculpture sociale” pour évoquer ce lien entre les artistes et les habitants. Le terme, d’origine académique, renvoie “à la manière dont l’artiste peut intervenir pour accompagner les pratiques des usagers” ; un rôle rendu possible car “l’artiste est un agent social qui a un rôle d’intermédiaire neutre.” Un peu comme les enfants évoqués dans la première table ronde du Festival, la parole des artistes permet donc de faire émerger de nouvelles manières de faire. Ce qui implique de se mettre à l’écoute des habitants et usagers des lieux.

L’art pour être à l’écoute dans un monde en transition

Orbiane Wolff défend précisément “une approche design”, incluant par exemple des entretiens pour peaufiner jour après jour la programmation du lieu. Et de ne surtout pas proposer des idées figées, au risque qu’elles ne rencontrent pas leur public. Il faut donc en permanence s’adapter, itérer, modifier. “La notion de mutation est importante dans cette table ronde, analyse Stefan Shankland. Toutes les méthodes de travail qui existaient jusqu’alors et qui étaient conçues pour un espace stabilisé, en l’occurrence l’espace urbain, ne marchent plus à l’heure de la transition.”

C’est dans cette perspective que l’artiste a conçu le protocole Marbre d’ici, qui propose de concevoir des bétons artistiques grâce aux déchets de construction. “En travaillant avec les entreprises de démolition, on peut mettre de côté quelques mètres-cube de gravats. On les trie, on les concasse, on en fait des granulats et des pigments, et ensuite on en fait un béton recyclé teinté dans la masse.” L’objectif : que ce tas de gravats “retrouve une place une place dans la ville de demain”.

La ville comme terrain d’expérimentation fertile

En ce sens, le projet s’inscrit dans une réflexion plus large sur “l’urbanisme circulaire” cher à l’urbaniste Sylvain Grisot, qui avait introduit la première édition du Festival Demain la ville. L’occasion pour Loïc Fel de rappeler que “les artistes ont aussi vocation à porter un discours sur la ville”. Et pour Stefan Shankland d’interpeller les acteurs urbains dans leur ensemble, artistes y compris, en guise de mot de la fin. “Comment fait-on pour créer les conditions d’une expérimentation fertile au croisement entre l’art, l’écologie et l’urbanisme ?” Qui sait, peut-être cet appel du pied donnera-t-il lieu à une nouvelle table ronde lors d’une prochaine itération du Festival…

L’intégralité des échanges est disponible en vidéo ci-dessous !

{pop-up} urbain
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