Lahti en Finlande, future capitale verte
Dernière lauréate du prix de la capitale verte européenne, la ville de Lahti en Finlande a pris des mesures concrètes pour l’environnement. Depuis près de 20 ans, elle est pionnière dans les solutions de gestion des déchets, de mobilité ou d’entretien des espaces naturels.
Glaçon au soleil
Ce n’est pas un hasard si la ville de Lahti en Finlande est avant-gardiste en matière de stratégie écologique. Première ville lauréate du prix Capitale Verte Européenne située en région arctique, elle est particulièrement impactée par le changement climatique. En effet la région se réchauffe presque deux fois plus vite que la moyenne mondiale. Les enjeux environnementaux y sont donc cruciaux.
Bordée du lac Vesijärvi, Lahti signifie « baie » en finnois. En état critique, le Vesijärvi a été déclaré lac le plus pollué de Finlande à la fin des années 1970. Mais depuis, la ville a bataillé pour y recréer un écosystème naturel digne de ce nom. Les eaux usées domestiques puis industrielles qui étaient déversées ont été détournées, des mesures de réintroduction d’espèces ont été prises et à plusieurs reprises le lac est oxygéné artificiellement. Ces efforts ont été entamés par la prolifération d’algues rouges toxiques, due aux modifications dans la chimie du lac. Mais le travail a fini par payer puisqu’aujourd’hui le plan d’eau de 108 km2 de superficie reprend des couleurs. Et dans l’exercice, la ville s’est progressivement bâtie une conscience écologique.
Une forte volonté politique
Cette ville moyenne finlandaise de 120 000 habitants mène donc une politique environnementale vigilante depuis des années. Anticipant de 25 ans les objectifs de l’Union Européenne et de 10 ans ceux de la Finlande, elle vise de devenir neutre en carbone à l’horizon 2025, et ce, sans acheter de crédits carbone. En avril 2019, elle a achevé une transition énergétique majeure en cessant d’utiliser du charbon et elle compte consacrer près de 180 millions d’euros à une centrale de production de bioénergie respectueuse de l’environnement.
Elle s’est également distingué sur le plan de la gestion des déchets. Depuis une vingtaine d’années, une stratégie sophistiquée de réutilisation des déchets pour le chauffage et la production d’énergie a été mise sur pieds. D’abord, les habitants ont été sensibilisés durablement au tri, ils ont aujourd’hui accès à un réseau de déchetteries performant. Le développement d’un partenariat public privé régional pour la récupération et le traitement des déchets a également porté ses fruits.
Aujourd’hui 94% des déchets municipaux sont réutilisés pour produire de la chaleur ou de l’électricité, notamment grâce à un système pionnier de gazéification de combustibles dérivés des déchets. Dès 2017, une circulaire accompagne ces progrès en établissant une feuille de route en faveur de l’économie circulaire. Rédigée en partenariat avec l’Université des Sciences Appliquées de Lahti, elle témoigne de la forte volonté politique locale de pousser la logique de l’avant.
17 kg par semaine
Dans les mobilités aussi, Lahti fait fort. La municipalité mène un projet pilote en Europe pour tester une application personnelle d’échange de droits d’émissions carbone. Baptisée CitiCap, l’application a pour but de « récompenser les habitants qui marchent, roulent à vélo ou empruntent les transports publics pour réduire leur empreinte carbone. » Ce système d’incitation innovant consiste à accorder à chaque habitant 17 kg de dioxyde de carbone hebdomadaires. Si l’utilisateur excède son quota, il doit s’acquitter d’une indemnité. À l’inverse, s’il termine la semaine sous le quota, il gagne des euros virtuels. Pendant la phase de test, ceux-ci ne sont pas valables dans les commerces mais uniquement pour des services municipaux comme des tickets de bus à prix réduit ou des services de réparation de bicyclettes par exemple.
Le calcul de la consommation est réalisé par l’application de façon assez fine. Ainsi un trajet en voiture ne consomme pas autant s’il est partagé, s’il est fait en voiture thermique ou électrique. De plus, « le programme accorde des droits complémentaires aux utilisateurs en fonction de leur vie personnelle, de façon à ne punir personne » explique Anna Kuokkanen, responsable du projet à l’Université technologique de Lahti. Les foyers avec des enfants, vivant loin du centre ou accusant des problèmes de santé ont un quota plus élevé.
L’orchestre neutre
Aux côtés de ces politiques stratégiques pour la ville, des mesures plus symboliques sont mises en place. À l’occasion du 150ème anniversaire du compositeur finlandais Jean Sybelius, l’orchestre symphonique de la ville a annoncé devenir neutre en carbone. Les émissions liées au transport ou au fonctionnement des locaux ont été examinées et réduites.
L’accès à la nature en ville a également été amélioré : désormais 99% des habitants vivent à moins de 300 mètres d’un espace vert urbain. Le prix Capitale Verte Européenne récompense ainsi chaque année depuis 2010 les villes de plus de 100 000 habitants les plus mobilisées en faveur de l’environnement. Décerné par la commission européenne, il est assorti d’une enveloppe de 350 000 euros. Les critères d’évaluation suivent douze thématiques allant de la biodiversité à la pollution, en passant par la gouvernance ou les mobilités. Lauréate pour l’année 2020, Lisbonne tient pendant cette durée le rôle d’ambassadrice, elle fera valoir ses progrès et ses bonnes pratiques. Lahti qui a tenu la dragée haute à deux finalistes françaises, Lille et Strasbourg sera donc l’ambassadrice pour l’année 2021. Une occasion de faire reluire sa nouvelle devise : « Des solutions locales pour un impact mondial ».