La seconde vie des cabines téléphoniques
Vestiges d’un autre temps, les cabines téléphoniques sont des équipements urbains en voie de disparition. Mais pour éviter leur démantèlement systématique, certaines villes ont décidé de leur offrir une seconde vie.
En Belgique, en Suède et aux Pays-Bas, elles ont totalement disparu. En France, en revanche, les cabines téléphoniques font encore de la résistance. Mais leurs jours sont comptés. Orange a prévu de démanteler d’ici 2016 toutes celles qui ne relèvent pas du « service universel des communications électroniques » (obligation d’entretenir au moins une cabine par commune et une deuxième pour les communes de plus de 1000 habitants). Pour éviter la disparition totale de ces drôles de boîtes qui ont transformé le paysage urbain dans les années 1970, les opérateurs et les citoyens français pourront toujours prendre exemple sur certaines initiatives étrangères. De New York à Prague en passant par l’Angleterre, un certain nombre de villes se sont en effet mobilisées ces derniers mois pour éviter à leurs cabines une fin tragique.
À New York, des bornes wi-fi
En mai 2014, le nouveau maire de New York Bill de Blasio a annoncé son intention de transformer les quelques 7000 cabines téléphoniques de la ville en bornes wi-fi gratuites. Un appel d’offres a été lancé pour mener à bien les travaux qui pourraient permettre à Big Apple de revendiquer le plus large réseau de wi-fi gratuit des États-Unis. Cette annonce n’est pas une surprise puisqu’en 2013 New York avait déjà transformé temporairement une dizaine de cabines en bornes Internet, pour un coût estimé à environ 2000 dollars par cabine. Ces travaux seront aussi l’occasion d’offrir un relooking aux vieilles cabines new-yorkaises, en aménageant notamment des écrans tactiles, des bornes pour recharger son téléphone et des espaces publicitaires. À New York, la cabine téléphonique du futur sera donc modulable, sur le modèle des projets proposés en 2013 lors d’un concours de création organisé par la ville. À l’époque, le projet NYC Loop proposait ainsi de transformer les cabines en photomatons au look futuriste, faisant aussi office de parking à vélo et de banc public. Autre projet ayant marqué les esprits : le NYC Beacon, qui consistait à aménager un panneau tactile de 3,60 mètres fonctionnant à l’énergie solaire et fournissant aux citadins des infos en temps réel sur leur ville (état de la circulation, exposition aux pollens, parcs à proximité…) dans une logique d’open data.
En Autriche, des bornes de recharge pour véhicules électriques
En 2010, l’opérateur Telekom Austria, propriétaire des quelques 13 500 cabines téléphoniques du pays, en a transformé quelques-unes en bornes de recharge pour alimenter les véhicules électriques (compter 6h30 de charge pour une voiture et 20 minutes pour un vélo). Le coût de transformation d’une vieille cabine en borne électrique ne dépasserait pas 3000 dollars, d’après l’opérateur. Un projet similaire a vu le jour en Espagne, dans la banlieue de Madrid. Grâce à une carte pré-payée, les possesseurs de véhicules électriques peuvent recharger leur engin sur une ancienne cabine téléphonique située au pied du siège de l’opérateur Telefonica.
En Angleterre, des mini-bibliothèques
Propriétaire des célèbres cabines rouges, l’opérateur téléphonique British Telecom a lancé en 2008 l’opération Adopt a Kiosk. Le principe : permettre aux collectivités de devenir propriétaires de ces emblèmes du patrimoine local en échange d’une livre symbolique. L’opération a permis de limiter le nombre de cabines démantelées. La plupart des villages anglais ont fait le choix d’aménager leur « red box » en mini-bibliothèque, où les habitants peuvent venir déposer et emprunter gratuitement des ouvrages, à toute heure du jour et de la nuit. D’autres ont préféré en faire un support pour des installations artistiques ou des kiosques à poèmes. Depuis, l’initiative de British Telecom a fait des émules un peu partout en Europe. C’est le cas notamment à Prague, où des citoyens se sont associés à l’opérateur Telefonica Czech Republic pour aménager 9 cabines téléphoniques de la capitale en bibliothèques. La France aussi s’y met. À Chambéry, l’association Savoie Récup a installé quelques étagères dans les cabines de la ville pour faire de ces lieux des « bibliothèques libres et autogérées ». Enfin, dans le cadre du 50ème anniversaire du Traité de l’Elysée, des lycéens des Yvelines et de Berlin ont mis en place en 2013 un programme d’échange de cabines téléphoniques, transformées pour l’occasion en « BücherboXX » (« boîtes à livres »)
Au Japon, des aquariums géants
En 2007, l’artiste français Benedetto Bufalino s’est associé au concepteur d’éclairage Benoît Deseille pour transformer une cabine téléphonique en aquarium. Une installation réalisée dans le cadre de la Fête des Lumières de Lyon, et présentée de nouveau lors du Lumiere Festival de Durham, en novembre 2013. « Avec l’avènement du téléphone portable, les cabines téléphoniques sont devenues obsolètes. Nous avons retrouvé cette cage de verre et l’avons transformée en un aquarium plein de poissons aux couleurs exotiques ; c’est une invitation à l’évasion et au voyage », déclaraient les deux artistes pour présenter leur création. Leur installation aquatico-lumineuse a probablement inspiré le collectif d’artistes japonais Kingyobu qui, en 2012, a transformé à son tour une cabine téléphonique d’Osaka en aquarium. Il leur a suffi de sceller la pièce de mobilier urbain, puis de la rendre étanche, d’aménager un système d’aération et de verser de l’eau et des poissons à l’intérieur de ce bocal géant.
En quoi faudrait-il selon vous transformer les cabines téléphoniques ?