La livraison par drone, une solution pour les zones rurales et isolées ?
La livraison par drone fait partie de ces technologies dont on parle beaucoup sans savoir si elles verront réellement le jour. Néanmoins, s’il semble que leur déploiement à grande échelle en ville soit utopiste, il existe un potentiel sur le sujet pour les zones rurales ou isolées.
Ces dernières années auront été des années fastes pour le développement de la livraison à domicile. Un phénomène accéléré par la pandémie de Covid-19 qui a ancré encore davantage dans les mœurs le e-commerce. En quelques mois, les commerçants qui ne livraient pas se sont mis à livrer. Les enseignes, comme Carrefour, se sont rapprochées des plateformes de livraison que sont les Uber Eats et autres Deliveroo. En parallèle, à coup d’énormes levées de fonds, les applications de quick commerce – qui promettent de livrer en une heure n’importe quel produit à domicile, de la brosse à dent à la bouteille de badoit – ne cessent de s’installer dans le paysage.
Un essor considérable qui fait pourtant face à de nombreux défis relatifs – entre autres – à l’optimisation de la prise en charge et de l’envoi des commandes ainsi qu’à l’empreinte carbone du secteur de la livraison. Rappelons qu’en 2020, près d’un milliard de colis ont été distribués dans l’Hexagone, soit pas moins de 137 000 tonnes d’emballages plastiques et cartons, selon les chiffres de La Poste. Mais cela représente aussi de nombreux déplacements, en particulier sur le dernier-kilomètre.
Alors que le transport représente 31% des émissions françaises de gaz à effet de serre, la multiplication des livraisons pose ainsi un problème majeur à nos efforts de décarbonation si des solutions ne sont pas trouvées pour réduire l’utilisation des utilitaires, voitures et scooters thermiques rapidement. Il y a évidemment la possibilité de les électrifier. Une voie qu’utilisent plusieurs acteurs comme CityScoot à Paris. Il y a aussi d’autres solutions comme le recours aux vélos et vélos cargos. Un vélo-cargo triporteur possédant une caisse de 1 500 litres émet par exemple 85% de CO2 en moins qu’un véhicule thermique de la même capacité.
En parallèle, l’augmentation de la livraison à domicile s’est accompagnée d’un autre sujet : celui de la vitesse. Un argument marketing qui drive de nombreux acteurs du sujet : tout livrer, le plus rapidement possible, partout. Le quick commerce est né de ce paradigme déjà énoncé auparavant par des acteurs comme Amazon, qui n’hésitait pas – à ce sujet – à mettre en avant l’idée utopique d’utiliser des drones pour réaliser des livraisons en moins d’une heure. Une idée qui, aujourd’hui, peine encore à convaincre sauf pour certaines applications.
La livraison par drone en zones urbaines : une utopie “high-tech” ?
Rapidement, les géants de la tech se sont donc emparés du sujet de la livraison par drone en n’hésitant pas à réaliser des annonces édifiantes sur le sujet. Google, par exemple, a été le premier à chercher à développer ce service à grande échelle. L’entreprise américaine a même déployé son service – baptisé Wing – dans une localité australienne surnommée la “capitale mondiale de la livraison par drone” où l’entreprise teste le modèle à échelle réelle. Mais, pour le moment, elle n’en lève pas encore les freins. En 2013, Jeff Bezos a lui aussi partagé son objectif de livraison de colis par drone. Elle a réalisé un premier test de livraison en 2016 en Angleterre, dans le cadre du projet pilote de Prime Air. Un projet qui, depuis, semble battre de l’aile. L’équipe de R&D française qui travaillait sur le projet a d’ailleurs été réaffectée à d’autres sujets pendant la pandémie.
On dénombre toujours beaucoup d’acteurs qui travaillent sur ces projets de drones mais, à l’image du développement des “taxis volants” ou de l’Hyperloop, les grands projets high-tech en matière de mobilité ont du mal à voir le jour. Surtout que dans de nombreux cas, les solutions low-tech (le vélo, par exemple) convient bien mieux à nos usages. Il existe cependant quelques cas de figures où le drone pourrait trouver son utilité. En particulier dans des zones isolées où très difficiles d’accès.
En France, des expérimentations en zones isolées
Ainsi, le drone, ou Robotic Process Automation tel qu’il est présenté dans le rapport du projet SHERPA (2020), est perçu comme une solution d’avenir favorisant le désenclavement rural. Ce projet, c’est un projet porté par l’ADEME et basé sur les données relatives à une ligne d’expérimentation de livraison par drone en montagne.
Réalisé sur 12 mois, il a permis de comparer les émissions de CO2 d’un drone par rapport aux “modèles connus sur l’équivalent carbone rejeté par les Véhicules Utilitaires Légers (VUL)”. Et ses conclusions sont intéressantes : plus la distance à parcourir pour le véhicule est importante, et plus la livraison par drone apporte un véritable gain écologique.
Outre ce projet, décembre 2016, la direction nationale de l’aviation civile avait offert au groupe La Poste la possibilité d’ouvrir une ligne commerciale de livraison par drone entre Saint Maximin la Sainte Baume et Pourrières, deux communes difficiles d’accès, dans le département du Var. En 2019, La Poste a poursuivi cette dynamique avec l’ouverture d’une seconde ligne en Isère, via une plateforme mobile installée directement sur le camion des livreurs permettant à ces derniers d’optimiser leur trajet en zone montagneuse. Dans ces cas de figures, un drone se charge d’effectuer à leur place le trajet sur 3 kilomètres en 8 minutes aller-retour.
Un gain de temps intéressant mais qui reste aussi tributaire des conditions météorologiques, par exemple, mais aussi d’autres freins qui ne sont pas encore levés sur le sujet et qui pourraient ralentir le déploiement de cette technologie.
Une solution qui présente encore de nombreux freins
Bien qu’en zones rurales et isolées, le drone présente une certaine pertinence – notamment sur le plan environnemental – beaucoup de freins restent encore à lever pour développer la livraison par drone à grande échelle. Entre autres questions se pose la question de la réglementation en vigueur concernant les autorisations de vol, les assurances en cas de pertes ou de dommages ainsi que les capacités de ces appareils.
Wing, le service de Google qui est le plus avancé sur le sujet, propose actuellement un service de livraison aux colis d’1,3 kg dans un rayon de 20 km autour du centre de déploiement. Mais des interrogations subsistent concernant le poids maximal qu’un drone est en mesure de transporter. En outre, on manque aussi d’infrastructures permettant les phases de décollage et de réception des colis. L’efficacité d’une livraison par drone en zones isolées reste donc relative mais bien présente.
Vos réactions
Merci pour ces détails et cet article sur la livraison par drone et la logistique que ca entraîne.