La limitation de vitesse à 30 km/h en ville est-elle une tendance durable ?
Après Grenoble en 2016, Lille en 2019 et Nantes en 2020, Montpellier, Nice et Paris devraient suivre le mouvement en 2021. Mais quel mouvement ? Celui qui consiste à limiter la vitesse à 30 km/h en ville. Une tendance qui se généralise peu à peu en France.
La limitation de la vitesse à 30 km/h est une mesure qui séduit de plus en plus de métropoles mais aussi beaucoup de petites et moyennes villes françaises. On compte aujourd’hui plus de 200 communes qui sont totalement ou partiellement limitées à 30 km/h. Et ce mouvement s’accélère ces dernières années.
Un engouement qu’on retrouve également à l’étranger et qui fait partie des nombreuses mesures permettant de rééquilibrer l’espace public au profit des mobilités douces. Car une vitesse apaisée en ville, c’est aussi moins de nuisances, moins d’accidents et – dans de nombreux cas – moins de circulation.
Petit historique de la notion de “ville 30”
L’apparition en Europe de voies limitées à 30 km/h en ville date des années 1970 aux Pays-Bas. Dans les villes de Lelystad et d’Almere, la vitesse est ainsi réduite en l’absence d’aménagements cyclables. Plus tard, elle sera généralisée dans tous les quartiers résidentiels, ne laissant les voies à 50 km/h que sur les grands axes.
Un concept qui est repris en Allemagne où des zones 30 apparaissent dans les années 1980 à Hambourg, Brême, Munich et Berlin. Des villes qui sont aujourd’hui limitées à 80% à 30 km/h. En Autriche, la ville de Graz est la première ville européenne à se déclarer entièrement “ville 30” en 1992.
En France, Fontenay-aux-roses (2005), Nogent sur Marne (2006) et Sceaux (2007) sont les premières villes à généraliser la circulation à 30 km/h au début des années 2000. En 2016, Grenoble est la première métropole à appliquer la limitation à 30 km/h sur la majorité de ses communes (43 sur 49).
Plus récemment encore, c’est le gouvernement espagnol qui a décidé d’imposer à l’ensemble de ses collectivités locales d’abaisser la vitesse à 30km/h dans toutes les rues à voies simples (ce qui n’inclut pas les grands axes mais représente 80% des rues) et qui devrait avoir un impact considérable par l’ampleur de la mesure.
Limiter la vitesse à 30 km/h, à quoi ça sert ?
En premier lieu, la limitation de la vitesse à 30 km/h en ville est une mesure qui vise à protéger les piétons et cyclistes. Quiconque a passé son code de la route récemment a dû l’apprendre : un piéton a 95 % de chance de survie lors d’un choc à 30 km/h, contre 53% à 50 km/h et seulement 20% de chance de survie à 60 km/h.
Un constat validé par exemple à Helsinki en Finlande, ville qui n’a plus enregistré de décès de piétons dans ses rues depuis 2019. Au Canada, la ville de Toronto estime que les accidents de la route ont diminué de 67% depuis qu’elle a abaissé la vitesse.
C’est aussi une mesure qui favorise un rééquilibrage de l’espace public au profit des mobilités douces : vélo et transport en commun. Une étude du CEREMA réalisée à Grenoble 3 ans après la réduction de la limitation de la vitesse faisait d’ailleurs état de ce report modal avec des diminutions de 9% des véhicules légers et de 20% des poids lourds.
Un rapport du Commissariat général au développement durable validait d’ailleurs ce constat en 2018 en estimant que la baisse de vitesse à 30 km/h en ville pousserait, en moyenne, 1 personne sur 5 à abandonner la voiture pour un autre mode de transport.
Un report modal qui améliore aussi la fluidité du trafic en ville et réduit donc les nuisances sonores et la pollution.
Une tendance durable si elle est accompagnée de mesures fortes
Sans véritable surprise, la limitation de vitesse à 30 km/h n’est pas une mesure réellement respectée par les automobilistes français. À Grenoble, la vitesse moyenne sur l’ensemble de la métropole est ainsi passée de 39 km/h à 37 km/h. À Lille, quelques mois après le lancement, la métropole estimait que la mesure n’était respectée que par 60% des automobilistes. À Nantes, il suffit de se balader dans la ville pour en arriver aux mêmes conclusions, et ce malgré le marquage au sol et les panneaux lumineux qui viennent rappeler cette nouvelle réglementation.
Certains élus estiment d’ailleurs que, sans contrôle de type radars, cette mesure est inefficace. Une vision étriquée du problème puisque d’autres mesures permettent de renforcer la réduction de la vitesse.
C’est par exemple le cas de la suppression des places de stationnement en centre-ville, de la piétonisation de certains axes (ou la création de zones de rencontre et de ZFE) ou encore du remplacement des feux tricolores par des ronds-points. La révision des plans de circulation sur les modèles de Gand en Belgique ou Groningue aux Pays-Bas sont également intéressants dans ce cadre.
Cela nécessite des politiques volontaristes mais qui peuvent fonctionner. C’est par exemple le cas à Ljubljana, une capitale presque-sans-voitures ou encore celui de la ville espagnole de Pontevedra.
Vos réactions
A quand la rue aux usagers !
Les voitures au garage, et retrouvons l’espace publique pour le bonheur des usagers
La limitation à 30km/heure est une mesure particulièrement intéressante. Elle permet de réduire le taux de mortalité des piétons dans les accidents de voiture, mais aussi de fortement réduire le taux de pollution atmosphérique. C’est une mesure moins drastique que les stationnements hors-centre (même si cela peut être complémentaire) et très peu coûteuse. Voir que des grandes villes comme Lille et Nantes ont pris le pas est très encourageant et montre que c’est une mesure qui est tout à fait envisageable à large échelle.