Guérilla jardinière : végétaliser pacifiquement les villes

Jardin mobile dans le quartier de Neuköln, à Berlin. Crédits : Stan Wiechers / Flickr
6 Oct 2015

Les 26 et 27 septembre, Paris et 23 autres villes partenaires accueilleront la nouvelle édition de la Fête des Jardins. L’occasion de s’intéresser au mouvement de la « guérilla jardinière », une forme d’activisme urbain née au début des années 2000 et théorisée par le britannique Richard Reynolds, auteur en 2010 du livre La Guérilla jardinière (éd. Yves Michel, 2010).

Jardin mobile dans le quartier de Neuköln, à Berlin. Crédits : Stan Wiechers / Flickr

Jardin mobile dans le quartier de Neuköln, à Berlin. Crédits : Stan Wiechers / Flickr

Si Londres, ces dernières années, a vu fleurir des tournesols par centaines sur ses ronds-points et bordures d’autoroutes, c’est entre autre grâce à la détermination de Richard Reynolds. Diplômé d’Oxford et de la Royal Horticultural Society, Reynolds est le chantre de la guérilla jardinière, une forme d’activisme environnemental dans l’espace urbain. L’histoire démarre le jour où il constate que les espaces verts de son quartier sont laissés à l’abandon par les pouvoirs publics. Il entreprend alors de jardiner lui-même le « triste amas d’arbustes décrépits, de gravats et de détritus divers » situé devant son immeuble. En 2004, quand il ouvre son blog GuerillaGardening.org, il ne sait pas encore qu’il est loin d’être le seul à donner bénévolement de son temps pour verdir sa rue.

Création de beauté

Un peu plus de dix ans plus tard, la guérilla jardinière a fait du chemin, à défaut de devenir un phénomène mainstream. Si Richard Reynolds publie aujourd’hui un livre-manifeste sur le sujet (La Guérilla jardinière, éd. Yves Michel, 2010), c’est justement pour favoriser la reconquête du végétal par tous les citoyens, dans un monde de plus en plus urbanisé. Pacifiste malgré son nom guerrier, ce mouvement entend contrer deux « ennemis » : la rareté et le délaissement, « deux problèmes qui proviennent de l’usage que nous faisons de la terre. » Pour Richard Reynolds, la force du jardinage dans sa forme la plus pure est son « potentiel de création de beauté et de productivité dans le paysage. S’y adonner en public, sur un terrain qui ne vous appartient pas, envoie un message fort. La société a besoin de cette créativité. »

Le concept de guerilla gardening n’est pas récent. Il est né en Angleterre, au milieu du XVIIe siècle, avec le mouvement des diggers, ces « piocheurs » qui se mirent à cultiver des légumes sur des biens communaux pour protester contre l’injustice des lois agraires anglaises. Dans son livre, Reynolds revient longuement sur cet héritage historique, même si le cœur de son livre est de soulever les différentes problématiques posées par les terres en friches et donc de questionner la notion de propriété foncière dans les grandes villes.

L’arsenal du guerillero jardinier

Dans la seconde moitié de son livre, Reynolds s’attarde avec humour sur les conseils à mettre en pratique pour devenir un guerillero jardinier digne de ce nom. Sa description minutieuse de l’arsenal nécessaire pour jardiner en ville (plantes incongrues et spectaculaires, tenue adaptée, etc.) vaut le détour. Le livre regorge également d’anecdotes qui révèlent l’esprit de débrouillardise des jardiniers urbains et solidarité à l’œuvre lorsqu’il s’agit d’embellir une terre en friche. À ceux qui hésitent à franchir le pas, l’auteur rappelle qu’il n’est « pas nécessaire d’inventer des excuses élaborées expliquant pourquoi nous rentrons si tard, mains et genoux couverts de boue. » L’important est plutôt de présenter sa démarche à ses proches, dans le but d’en recruter certains pour grossir les rangs de la guerilla. Enfin, Reynolds rappelle au lecteur qu’à titre personnel, il n’a pas attendu qu’on lui donne la permission pour jardiner en ville. Un volontarisme qui permet souvent de faire bouger les lignes plus rapidement : « Choisir de cultiver le terrain d’autrui s’il est négligé, c’est prendre une responsabilité là où d’autres ne l’ont pas prise. »

La Guérilla jardinière, de Richard Reynolds, éd. Yves Michel, 2010

Les phrases clés :

« La guérilla jardinière est une lutte pour les ressources, une bataille contre la rareté de la terre, la destruction de l’environnement et le gaspillage des opportunités. C’est aussi un combat pour la liberté d’expression et la cohésion sociale. »

 « La guérilla jardinière est aussi une façon d’apporter une petite contribution à la santé de la Terre : en bref, plus de plantes signifie plus d’absorption de carbone, des paysages plus productifs et des climats moins chauds. »

« Faire pousser des fruits et des légumes peut être une expérience extrêmement enrichissante. Outre l’aspect alimentaire, elle peut constituer un antidote spirituel à un environnement débilitant. »

 « Les guérilleros jardiniers refusent d’accepter d’entasser des végétaux sur les rebords de fenêtre et les balcons, ou bien de devenir experts en plantes d’intérieur. Nous répondons à la densité de population des villes en augmentant la densité en jardins. Notre offensive démontre que la société n’a pas besoin de choisir entre les villes denses et les cités-jardins. »

 « Quand il n’y a jamais eu de couleur, un guérillero jardinier trouve le moyen d’en apporter dans l’environnement, discernant un potentiel là où les autres ne voient qu’aridité et ennui. Une cour nue, une rue sans joie, un rond-point chauve ou un lopin abandonné offrent tous des opportunités. »

Usbek & Rica
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