Gare du Nord, la gare du futur ?
Grande nouvelle, la gare du Nord va s’agrandir à horizon 2023 ! Réforme SNCF, après Brexit, accueil des Jeux Olympiques de 2024 ou encore Paris 2030, la gare du Nord est au cœur d’enjeux d’ampleur actuels et futurs. Pour financer les travaux, la SNCF a passé un accord avec un groupe privé, comme pour les travaux de Saint-Lazare et de Montparnasse. C’est un projet d’envergure puisque la Gare du Nord va tripler de volume : elle s’équipe d’un nouveau terminal mais aussi d’espaces commerciaux, de bureaux, de loisirs ainsi que d’une piste de course d’athlétisme sur son toit.
Alors ces transformations nous interrogent : Quel avenir présager pour les gares de nos villes ? A quoi ressembleront-elles demain ?
Un lieu important pour le transport français et européen
Cette nouvelle gare moderne, porte d’entrée sur la ville, sera, avant toutes choses, essentielle dans l’organisation des Jeux Olympiques de Paris. Le projet devrait être opérationnel pour 2023 afin d’assurer l’accueil des voyageurs à l’occasion de ce grand événement qui bénéficiera d’un rayonnement mondial. La qualité des infrastructures proposées aux touristes est donc un enjeu majeur pour la ville et l’image qu’elle souhaite renvoyer à l’international.
La Gare du Nord est aujourd’hui la plus fréquentée d’Europe avec près de 700.000 passagers chaque jour. Elle dessert 4 pays européens que sont l’Angleterre, la Belgique, les Pays-Bas et l’Allemagne. Elle devrait continuer à accueillir de plus en plus de monde, pour atteindre avec une prévision à 800.000 voyageurs pour les JO 2024.
Un projet pour une nouvelle gestion des flux
Le projet de rénovation imagine une nouvelle gestion des flux de voyageurs. En effet, il induit une refonte des systèmes d’arrivée et de départ qui sont actuellement mélangés : avec le nouveau projet, ils devraient être séparés dans des espaces bien distincts. Une passerelle est envisagée et elle devrait être construite afin d’assurer l’accès aux trains pour les départs, tandis que l’arrivée se fera toujours sur les quais. Un moyen de réguler le nombre de personnes qui se croisent et donc de permettre une mobilité plus aisée.
De plus, le Brexit étant acté, les frontières avec le Royaume-Uni vont être fermées. Cela impose donc un agrandissement de la zone Eurostar pour permettre la mise en place des espaces de contrôle douanier. Car oui, comme l’affirme Guillaume Pepy, PDG de la SNCF, le Brexit ne devrait pas réduire le trafic vers la Grande-Bretagne, bien au contraire, “Il va plutôt augmenter, de 50 %, d’ici 2030”. L’avenir du train serait celui d’une augmentation généralisée du trafic dans toutes les grandes gares, certaines pourraient accueillir deux fois plus de passagers en 2050, comme à Montparnasse.
Difficile de prédire exactement ce que seront les gares dans plus de 30 ans mais pour répondre aux enjeux environnementaux, le train semble être l’une des solutions les plus adaptées. De plus, si la dynamique se poursuit il faudra prévoir une baisse du trafic automobile dans les centres urbains ce qui pourrait accroître le nombre d’usagers sur les lignes ferroviaires.
Un nombre auquel pourrait s’ajouter des visiteurs qui n’ont pas l’intention de prendre le train, mais simplement de réaliser des achats ou de faire du sport dans la nouvelle gare qui devrait, d’après les dires du président de Ceetrus, Monsieur Vianney MULLIEZ, assurer la “reconnexion avec la ville”. Un projet qui cherche à créer un lien fort avec le reste de la ville comme leque souligne également Patrick Ropert, directeur général de SNCF Gare & Connexion qui a récemment déclaré “chaque fois que nous transformons une gare, nous transformons un quartier de ville.”. Car avec la modification de la gare viendront des modifications du quartier, des rues pourraient devenir piétonnes, une nouvelle circulation, un nouveau paysage urbain. Il complète, “la gare du Nord va devenir la gare emblématique du XXIème siècle en adaptant le maximum de services aux attentes de notre société”. Au-delà de la transformation du quartier, c’est presque un micro-quartier qui se créera peut être dans cette gare.
Une gare aux multiples usages
Ainsi, après l’aménagement d’autres gares comme Saint Lazare, la Gare du Nord va devenir à son tour un grand centre commercial au cœur de Paris. Cela suit la stratégie adoptée par la SNCF depuis quelques années de convertir les grandes gares en pôles multifonctionnels dont l’activité principale, après le transport, est commerciale. Des lieux ferroviaires qui semblent par ailleurs de plus en plus s’aligner sur le modèle aéroportuaire français.
Une aubaine pour la SNCF qui dispose d’importants terrains à louer pour les commerces ainsi que d’un trafic dans ces polarités urbaines qui assure une visibilité et une clientèle permanente. Le projet a été imaginé par l’agence d’architecture Valode & Pistre, déjà présents pour la création de deux galeries marchandes à Paris que sont Bercy Village et Beaugrenelle ou encore la large tour Incity dans le quartier d’affaires Part-Dieu de Lyon.
Alors que les gares de la SNCF sont souvent annoncées comme en route vers la privatisation, ce projet peut de nouveau donner cette impression. Il s’agit toutefois d’une ‘semi-privatisation’ car le groupe reste propriétaire des murs et accorde une exploitation de 46 ans à un groupe privé, ici Auchan via sa branche immobilière Ceetrus. Une société anciennement connue sous le nom d’Immochan et déjà impliquée dans Europacity, l’immense projet de centre commercial contesté en banlieue parisienne.
Le coût de ce nouvel aménagement s’élève à 600 millions d’euros. La principale réalisation du projet sera une grande structure en verre et bois à la place des verrières actuelles du terminal régional. Elle accueillera une importante zone commerciale le long d’une rue intérieure sur 300m et 5 niveaux. Une transformation conséquente puisque la surface commerciale sera ainsi multipliée par 5 avec des services répondant aux besoins modernes qui seront mis à disposition, comme par exemple des locaux de bureaux, des espaces de workshop, des garages à vélo… Sur le toit sera même construit un grand jardin panoramique offrant une vue sur Paris avec une piste de course !
Une offre de service qui reflète les changements de modes de vie des citadins d’aujourd’hui, à la recherche de ces tiers-lieux qui proposent dans des polarités et un seul même lieu, un panel d’usages diversifiés. Il s’agit donc bien de proposer une expérience urbaine qui dépasse la fonction originelle de celle de la gare.
Mais peut-on vraiment faire en sorte que nos gares deviennent des morceaux de ville à part entière ? Ce modèle pour le futur des gares françaises peut-il vraiment intégrer dans son fonctionnement de nouveaux usagers ? L’objectif de ces projets est bien d’intégrer la gare dans la vie de quartier, d’en faire une centralité pour les usagers, afin d’y attirer, non pas seulement les personnes qui empruntent les trains, mais également des habitants des environs afin de mieux s’intégrer dans l’urbanité des quartiers où ces gares s’ancrent.
Alors que de nombreuses gares sont actuellement en travaux pour des projets de restructuration importants dans les grandes villes françaises, on peut supposer qu’un écart se creusera entre les grandes destinations, toujours bien desservies par le TGV, pour lesquelles d’importants investissements sont réalisés afin de créer des espaces attractifs et dits, innovants; et des plus petites gares desservies par de petites lignes et qui souffrent du manque d’investissement. Ces dernières risquent d’ailleurs pour certaines d’être fermées, alors même que le maintien de celles-ci permet d’éviter la désertification en milieu rural et de favoriser la décentralisation.
Par ailleurs, les projets de coworking se multiplient dans des gares désaffectées comme par exemple à Saint-Germain-en-Laye, où la Ruche va installer des locaux au Quai des possibles, un tiers-lieux situé dans la Gare de la Grande Ceinture. Et si demain, le véritable défi était plutôt de réinventer les gares des petites lignes afin d’en faire à nouveau le cœur des villes qu’elles desservent et afin qu’elles retrouvent la richesse de leur potentiel urbain ? Et si c’était finalement cela aussi la gare du futur ?
Vos réactions
« Demain, le véritable défi serait plutôt de réinventer les gares des petites lignes afin d’en faire à nouveau le cœur des villes qu’elles desservent et afin qu’elles retrouvent la richesse de leur potentiel urbain ? Et si c’était finalement cela aussi la gare du futur ? »
Tout à fait d’accord. Marre du gigantisme et de la mégalomanie des décideurs SNCF et des concepteurs de projets grandioses et inhumains. Combien de gares et de stations évitées à cause de leurs longs couloirs et de leurs liaisons glauques. Combien de trajets préférés à d’autres et finalement choisis par évitement d’une gare de départ vertigineuse et glaçante. Quand à la gare du Nord, avec de tels projets, quel habitant ne douterait pas de la casse du tissus urbain et social adjacent!
Tout ce que je vois c’est qu’encore une fois Paris n’est que Tourisme. Vive PARISLAND. La notion d’USAGERS n’existe pas on ne parle que des touristes, pourtant beaucoup de personnes traversent cette gare pour se rendre au travail. Des trains à l’heure c’est la seule chose que nous demandons et non pas de la poudre aux yeux