Eclairage public : appel à LED
Ville et lumière ont longtemps fait bon ménage. Un mariage quelque peu forcé par la nécessité, tant “lumière” rime avec “sécurité crépusculaire” : qu’il s’agisse de torches ou de lampadaires, l’éclairage a toujours eu vocation à repousser les inquiétants ténèbres qui parsèment les ruelles de nos villes. Dans ce contexte, la question de la lumière urbaine s’est longtemps cantonnée à cette louable réassurance.
Les choses tendent toutefois à évoluer, depuis une dizaine d’années environ, et l’éclairage public s’étoffe de nouvelles ambitions : mise en valeur du patrimoine, marketing territorial, ou encore “évenementialisation” voire marchandisation de l’espace urbain font ainsi partie des nouvelles prérogatives allouées à nos bons vieux lampadaires. Cela n’est pas sans poser de questions écologiques, mais aussi techniques, économiques voire sociologiques. Opérateurs et collectivités rivalisent ainsi d’inventivité pour donner à la lumière urbaine la place qu’elle mérite. Que la lumière soit, et la lumière fuse !
Ô, Ville Lumière
Mutation majeure de ces dernières années, la lumière a en effet gagné certains gallons auprès de collectivités ambitieuses, à travers l’instauration de “plans Lumière” Ces “schémas directeurs d’aménagement lumière” (SDAL), c’est leur petit nom, peuvent avoir des vocations aussi diverses que variées, comme le résume Wikipedia :
- « urbanistiques : accessibilité et lisibilité des espaces publics ou semi-publics, sentiment de sécurité, cohérence avec les réseaux de circulation, structuration générale du territoire, …
- scénographiques : mise en scène d’espaces, définition de critères esthétiques, de mobiliers, de teintes de lumière, …
- économiques : gestion du coût d’investissement et de fonctionnement, programmation d’économies d’énergie et de la rotation du parc d’éclairage, …
- et environnementaux : réduction de la pollution lumineuse, protection nocturne des biotopes, empreinte écologique du système d’éclairage global, recyclage des sources et composants, …
Sagesse et maîtresse des vertus
Cette diversité des objectifs se traduit par un foisonnement d’innovation. La justification écologique vient faire le reste, amenant les industriels du secteur à évoquer “une urgence à 9 milliards d’euros”. Sans vouloir contredire ces brillants économistes, nous rappellerons toutefois que le mieux est souvent l’ennemi du bien. On conseillera donc une certaine précaution avant de dépenser ces 9 précieux milliards, qui pourraient vite passer pour une gabegie de plus en période de crise.
« “Les collectivités gèrent un potentiel d’économies d’énergie colossal”, explique Ophélie Barou, responsable des applications sur le marché des nouvelles technologies lumineuses au Cluster Lumière, qui regroupe à Lyon les principaux acteurs français du secteur. Plus de 45 % de la consommation d’électricité des communes dépend de l’éclairage public, et 3 millions de luminaires (soit 30 % du parc) sont encore équipés de lampes à vapeur de mercure, une technologie centenaire, polluante et peu performante qu’une directive européenne a condamnée à disparaître en avril 2015. »
Attention : cela ne doit pas empêcher pas industriels et collectivités d’innover, surtout lorsque cela est fait avec intelligence. Tout dépend encore de ce qu’on nomme intelligence…
Conclusions luminaires
Deux tendances principales se distinguent. La première repose sur un renouvellement relativement « basique » du parc luminaire, en remplaçant les traditionnelles ampoules par des LED (« light emitting diode ») à moindre consommation. Cet été, la ville de Los Angeles a ainsi annoncé le remplacement de près de 150 000 candélabres, donnant à cette technologie une envergure inédite. Plus proche de nous, Marseille, pionnière en la matière, semble largement convaincue des bienfaits : d’abord testées sur une rue piétonne en 2010, les LED envahissent depuis le reste de la ville. Et l’épineuse question du financement se révèle au final moins épineuse que prévu :
« La dépense à engager est importante au départ, mais le retour sur investissement est rapide, défendent les industriels. A Paris, le relooking lumière de la place de la Concorde, ce printemps, a permis de réduire la consommation de deux tiers, et l’investissement (362.000 euros) sera amorti en trois ans. »
D’autres initiatives s’annoncent plus astucieuse, en tirant partie du potentiel des capteurs et des technologies communicantes. Dans le cadre du vaste projet Issy Grid, Bouygues Energie & Services a mis en place des lampadaires intelligents, permettant de moduler l’intensité de l’éclairage « en fonction du trafic routier, de l’heure et des saisons. », voire de la présence humaine comme à Toulouse. Une type d’innovation qui semble faire des émules : suite aux succès rencontrés par Oslo dans le renouvellement d’un sixième de son parc, onze pays européens se sont réunis au sein du projet e-streetlight pour déployer plus largement ces technologies intelligentes.
A cela s’ajoutent les multiples travaux de designers et autres créatifs, prompts à imaginer les lampadaires les plus débridés, comme par exemple des arbres pour éclairer les villes ? Ces exemples témoignent du potentiel de changement que représente ce mobilier si familier. Et encore, nous n’avons fait qu’aborder ce sujet en surface. On pourrait donc défiler le sujet à l’envi, subsisterait toujours la même idée : la lumière urbaine à l’avenir devant elle.