Design et participation citoyenne 2/2
Ce n’est pas un scoop, notre système démocratique aurait besoin d’un bon coup de dépoussiérage. Les dernières élections ont mis en lumière la défiance de nos concitoyens face aux partis traditionnels, des tentations à exprimer une colère en se tournant vers les extrêmes ou encore une abstention record aux denières Législatives. Voilà pour le verre à moitié vide. Car si on analyse la situation dans son ensemble, on se rend compte de l’existence d’un certain nombre de leviers qui forment autant d’espoir de voir la situation évoluer. Et parmi les outils qui peuvent aider à retrouver de l’intérêt pour la chose publique et la participation citoyenne, le design a le vent en poupe ! Alors comment les designers généralement vus comme des fabricants de tables et de chaises peuvent ils bousculer notre approche de la démocratie et favoriser la participation citoyenne ?
La créativité pour libérer la parole
Le designer fait partie de la catégorie des créatifs. Ces gens un peu particuliers pour qui le crayon de bois et le carnet de croquis constituent les meilleurs amis. Pour le citoyen lambda, plus difficile de laisser libre cours à son imagination, à coucher ses idées sur le papier. Le designer va alors tenter de libérer cette créativité que noous avons tous enfouie en chacun de nous afin de pouvoir nous exprimer sur des projets. Si bien que des ateliers de créativité fleurissent un peu partout pour accompagner le débat citoyen. Pas besoin de savoir dessiner, il suffit juste de se laisser aller et coucher ses idées sur le sacro-saint post-it, instrument indispensable à toute séance de créativité. Par exemple, à l’occasion d’un atelier de concertation avec les habitants d’un quartier nantais, les étudiants du Design Lab Ville Durable de L’École de design Nantes Atlantique ont reproduit en maquette le quartier en question. Ils ont ensuite invité les habitants à planter des drapeaux pour identifier les problèmes, les frictions ou les points de blocage. Une manière de les mettre à contribution grâce à un processus créatif et de pourvoir permettre de matérialiser les demandes dans l’espace.
« Form follows fun »
Pour les tenants du fonctionnalisme, il est désormais admis que « form follows function » (la forme suit la fonction), selon la célèbre maxime de l’architecte Sullivan. Les tenants adeptes du post-modernisme nous ont eux appris que l’on pouvait voir les choses autrement, nous amenant ainsi à penser que « form follows fun », autrement dit, la forme peut tout aussi bien naître d’une approche plus ludique. C’est ce qu’essaie de mettre en avant le designer pour qui l’approche par le jeu constitue un axe intéressant à explorer dans le cadre de la participation citoyenne. Le jeu de plateau nous amène à envisager des situations différentes et à tenter de trouver des solutions, le tout parsemé éventuellement de contraintes à prendre en compte. Ainsi, le citoyen est amené à vivre une expérience en groupe, moins contraignante, plus amusante, où chacun a son rôle à jouer pour réfléchir à sa ville de demain.
De la participation à l’action
Si le design permet de débloquer des rouages et de favoriser une impulsion dans le processus de participation citoyenne, il n’en reste pas à ce simple stade. En effet, le designer cherche à améliorer la capacitation citoyenne, ce fameux empowerment qui permettrait au citoyen de gravir un barreau de plus dans l’échelle de la participation : celui de l’action. Il ne s’agit donc pas d’être là à un moment précis, puis de disparaître mais plutôt de transmettre le flambeau afin que le citoyen puisse à son tour agir pour sa cité, retrouvant ainsi le sens premier du mot politique.
Par Zélia Darnault, enseignante à L’École de design Nantes Atlantique
Vos réactions
Super article sur la concertation et les designers ! J’ai jamais pensé la concertation du côté design… Votre article tombe à pique pour moi qui ai ma soutenance de mémoire demain matin sur la concertation! 🙂