Des écoles d’architecture alternatives ?
Comment l’architecte peut-il répondre sérieusement aux enjeux sociaux et climatiques ? À travers un programme d’expérimentation européen mettant en lien des lieux abandonnés, des communautés locales et des architectes citoyens, le collectif Etc s’efforce de questionner la profession et d’imaginer ses évolutions.
Comme chaque mois, plongez dans le futur de la ville avec notre série “Habiter 2035”, où l’on vous dresse des scénarios possibles pour la prochaine décennie. Retenez votre souffle, immersion dans 3, 2, 1 …
À la hauteur des défis
Après un dernier tour de vote, la plaquette pédagogique est enfin validée à l’unanimité. Autour de la table, les parties prenantes se félicitent chaudement. Un an après le lancement d’une mission de réinvention des Écoles Nationales Supérieures d’Architecture (ENSA), elles peuvent en effet se targuer d’un important travail d’autocritique et d’exploration.
D’emblée, le comité de gouvernance avait acté l’importance de réunir une pluralité d’acteurs du monde de l’architecture : chercheurs et professionnels, mais aussi le personnel des écoles, les étudiants et même des « déserteurs », qui dénoncent l’incompatibilité des enseignements avec l’urgence sociale et environnementale. Tous ont donc été associés à part égale au travail d’écriture sur le futur de leurs écoles, une méthode tout à fait inédite qui témoigne de l’ambition réelle du projet. Le comité des enseignements a eu la lourde tâche de passer en revue l’intégralité des cursus quand de son côté, le comité prospectif a choisi de s’installer chaque mois dans un lieu commun différent en Europe, pour s’inspirer des méthodes et des énergies des initiatives locales.
Scénario possible ou récit de science-fiction ? Analyse.
Besoin de changement
Comme beaucoup d’autres professions au cœur d’enjeux sociaux et environnementaux, l’architecture est en crise d’identité. Depuis quelques années, les désertions et les collectifs se multiplient avec pour objectif de pratiquer leur métier autrement. Parmi eux, La preuve par 7, le Collectif Etc, Bellastock ou Quatorze explorent à leur manière les limites de leur formation et les différentes facettes de l’architecture. Comment faire face à l’épuisement des ressources, comment inclure les citoyens et les habitants, comment réactiver des savoirs vernaculaires ancrés dans les territoires, comment échapper à la maîtrise d’œuvre et aux logiques marchandes pour redevenir un service d’intérêt général ? En fin de compte, la question que posent ces collectifs est celle de la politisation de la profession, qui accompagne depuis plus d’un demi-siècle le saccage du vivant.
Initié en 2021, l’Architecture School of Commons est un programme de coopération européenne porté par le collectif Etc avec des communautés locales en France, en Italie et en Grèce. L’idée est de questionner le métier d’architecte à partir d’expérimentations citoyennes dans des lieux abandonnés. À plus long terme, le projet se “propose de réfléchir à l’intégration de pédagogies alternatives dans les cursus des écoles d’architecture”. Il rassemble ainsi de nombreux collectifs indépendants derrière lui et engage une discussion avec les écoles et leurs étudiants. Une première conférence avait lieu au Pavillon de l’Arsenal fin 2023, une seconde à la Gaîté Lyrique s’est tenue à la mi-octobre 2024.