Demain, chacun son éolienne au balcon
De plus en plus de français installent des systèmes de production d’énergie renouvelable chez eux. Mini-éoliennes et panneaux photovoltaïques, ces installations permettent de se réapproprier la production d’énergie et de réduire le prix des factures.
L’hiver 2035 aura eu raison de ses réticences. Depuis des années, son voisin bricoleur lui vante les mérites de son installation électrique DIY, aujourd’hui Eric achète son propre système d’autoconsommation. Excédé par les hausses de prix incessantes et à la faveur des nouveaux kits clé en main mis sur le marché, le voilà sur le parking de Leroy Merlin, à charger deux mini-panneaux solaires ultra-performants dans son vélo cargo. Lui qui était encore convaincu il y a peu que la production centralisée française était un fleuron industriel à défendre à tout prix, il a fini par entendre les sirènes de la production décentralisée. Il pourra désormais produire et consommer sa propre électricité, et même revendre l’excédent à EDF. De cette manière, il soutient le développement des énergies renouvelables et contribue à alléger la demande électrique sur le réseau principal.
Ce scénario n’a rien d’improbable, pour la bonne raison que le chemin est déjà engagé. Un nombre croissant de français fait le premier pas vers l’autoconsommation, qui désigne le fait de consommer de l’énergie que l’on a produite soi-même. L’idée est séduisante, elle est d’ailleurs encouragée par l’État qui propose des primes à l’achat et une TVA à taux réduit. De leur côté, les industriels développent des produits de moins en moins chers et de plus en plus faciles à adopter. Pour ne citer que lui, le géant IKEA a lancé Solstrale, un service d’installation de panneaux photovoltaïques clé en main pour les particuliers, à partir de 6 990 euros. L’entreprise affirme que l’investissement est amorti en 7 à 10 ans en moyenne.
Tendance beau fixe
« Sur le segment des toitures, les coûts de production ont été divisés par 3 en France depuis 2010, pour atteindre aujourd’hui des niveaux proches du prix de la fourniture d’électricité » explique l’ADEME dans une note de février 2018. « Dans ces conditions, l’autoconsommation résidentielle en France commence à se développer ». Comprendre : la niche est encore balbutiante, mais a des marges de développement importantes. C’est particulièrement le cas pour les maisons individuelles et dans le sud où l’ensoleillement est optimal.
Pour l’instant, l’énergie photovoltaïque ne représente que 3,2 % de la consommation finale d’électricité en France. C’est le mode d’autoconsommation le plus répandu car c’est la technologie la plus avancée et la plus simple à installer. Mais il existe d’autres solutions. Ici, on ne parle pas de fission d’uranium ou de combustion de charbon à la maison, il s’agit évidemment de profiter des énergies renouvelables (vent, eau, soleil), présentes partout sur le territoire.
Électriciens du dimanche, électriciens de demain
Dans ce domaine, il existe sur internet une myriade de bricoleurs du dimanche qui se démènent pour inventer des systèmes éoliens domestiques voire même de l’hydraulique lorsqu’ils vivent à proximité de cours d’eau… On trouve ainsi des dizaines de chaînes Youtube racontant de A à Z comment Laurent a dévié son ruisseau pour fabriquer une « pico-centrale hydroélectrique », comment Cristof est devenu autonome en électricité ou comment Barnabé a fabriqué un prototype d’éolienne avec des gouttières en plastique. Ces amateurs de Do It Yourself pourraient bien être les pionniers d’un mouvement de démocratisation de l’autoconsommation.
Les énergies renouvelables sont intermittentes, leur utilisation soulève la question du stockage. Des systèmes complémentaires de batteries apparaissent, ils gagnent en popularité en Allemagne notamment, mais ils allongent la durée nécessaire pour amortir l’investissement. Dans un article paru sur le magazine décroissant Yggdrasil, Barnabé Chaillot, bricoleur autodidacte détaille les étapes de fabrication maison d’une batterie Lithium.
Individuel ou collectif ?
Au-delà des maisons individuelles, l’autoconsommation est dite collective lorsque les producteurs ou les consommateurs finaux sont multiples et qu’ils se regroupent dans une entité juridique. Plus intéressante en ville, la méthode commence à être expérimentée. Elle ajoute une dimension sociale à la question de l’autoconsommation, en créant des liens entre les citoyens et entre les territoires. En janvier 2022, 84 opérations de ce type étaient en service en France. À Lyon, EDF et le promoteur OGIC ont testé l’autoconsommation collective sur un programme neuf, Ydeal Confluence. Tandis que dans la petite commune de Appy en Ariège, deux centrales photovoltaïques ont été installées sur les deux bâtiments municipaux et permettent de produire 35 % de la consommation annuelle des habitants. Le système permet de recharger la petite flotte de véhicules électriques offerte à la ville par Renault.
Sauf à vivre seul et dans une grande frugalité, il est peu probable qu’une installation individuelle suffise à vous rendre autonome. Pour la plupart des gens, l’autoconsommation n’est qu’une part de l’énergie totale consommée, le reste étant acheté auprès d’un fournisseur classique. S’il fallait résumer, c’est surtout un investissement pour réduire ses factures lorsque la météo est bonne. Un autre investissement pertinent pour réduire ses factures serait de rénover thermiquement son logement.
Démarche libérale
Une limite que différents youtubers ont soulignée. Loic le Jardineur admet qu’il est « tombé dans le panneau, le panneau des industriels du solaire ». Il dénonce l’impact écologique du photovoltaïque et regrette que les promoteurs de l’autoconsommation ne nous incitent jamais à réduire nos consommations. De son côté, la chaîne Écologie Rationnelle remarque que seuls les plus aisés pourront se payer une installation photovoltaïque, pour ensuite moins contribuer au financement du réseau : « Au nom du climat et du local on pousse à l’autoconsommation, ce qui fait que l’égalité de tarif disparaît et que la solidarité diminue. On est dans le pur libéralisme ».
En effet, l’ADEME n’en dit pas moins dans sa note de 2018: « Il est à noter que les autoconsommateurs contribuent moins au financement des infrastructures du réseau électrique que les autres consommateurs, pour un niveau de raccordement similaire. Ces pertes de recettes pour le financement du réseau sont aujourd’hui limitées ; mais il pourra être nécessaire, avec le développement de l’autoconsommation, de faire évoluer la tarification du réseau pour assurer une répartition équilibrée de son financement. »
L’agence publique poursuit: « Si l’autoconsommation répond à une demande croissante des citoyens de se réapproprier la production d’énergie, elle ne doit pas pour autant être associée à un idéal d’autarcie. Le réseau électrique est en effet un bien commun existant qui constitue une assurance permettant à l’autoconsommateur d’éviter d’importants surcoûts d’équipements ».
Vos réactions
« L’entreprise affirme que l’investissement est amorti en 7 à 10 ans en moyenne. » Bien trop cher et amortissement trop long, il faudrait 2-3 ans grand maximum pour que cela devienne intéressant et booste les ventes ! Mais en France, volonté & écologie sont à deux vitesses !
Sans oublier la lourdeur administrative, la limitation à 3KW (merci Total & EDF !).
Prime à l’achat ? Ah bon ? Aucune prime ni aide pour les installations plug&play, ces aides sont assorties à une obligation d’installation RGE..
TVA avantageuse ? 10 % ? Pourquoi pas 0% ? Il n’y a t-il par urgence ??