Dans la dynamique de l’entreprise sociale

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À Lyon Confluence, un projet immobilier d’habitat collaboratif, guidé par la municipalité, bouscule les règles de la vente en Véfa. Par ailleurs, la mise en place dans les quartiers prioritaires de quelque 700 conseils citoyens actifs – une forme de démocratie locale – commence à porter ses fruits.

Ville de Guingamp

© Ville de Guingamp

Quand le secteur public impulse l’initiative locale

LE CONSEIL CITOYEN, GUINGAMP – Un chemin à travers champs

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© Sandrine Herpe/Le Télégramme

En France, près de la moitié des quartiers prioritaires disposent d’un conseil citoyen. Ces conseils sont issus de la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014*. Principe : associer de façon plus étroite les habitants à la conception, au suivi et à l’évaluation des contrats de ville. Un conseil citoyen réunit de 15 à 50 membres, dont la moitié au moins sont des habitants tirés au sort : c’est le premier collège. Le second est constitué, sur appel à candidatures, de représentants des associations et d’acteurs locaux : commerçants, petites entreprises, médecins et professions paramédicales… La parité hommes-femmes doit être respectée, la participation des plus jeunes est souhaitée.
Autonome et indépendant, un conseil citoyen a vocation à représenter la population du quartier. Il peut solliciter des financements publics ou privés, notamment auprès de fondations. Il récolte d’abord des témoignages puis établit une forme de diagnostic en vue d’améliorer le cadre de vie des habitants. Suivent des demandes courantes – jardins partagés, animation de quartier… –, ou plus ciblées : ouvrir un atelier participatif de fabrication et de réparation de vélos, réhabiliter un stade…
Dans les Côtes-d’Armor, le conseil citoyen de Guingamp a, par exemple, créé pour les habitants une promenade en béton, auparavant chemin de terre, à Castel-Pic… D’autres organisent des conférences-débats, des jeux de rôles avec une compagnie de théâtre, contribuent à la réalisation d’un journal imprimé, d’un court-métrage, voire d’une chaîne de télévision locale sur le Web.

* Loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, JO du 22 février 2014.

IMMEUBLE D’HABITAT COLLABORATIF, LYON CONFLUENCE – Les futurs propriétaires imaginent les parties communes

Atelier Pop Corn

© Atelier Pop Corn

Le nouveau quartier Lyon Confluence, sous la houlette de l’aménageur SPL Lyon Confluence, propose, près de l’ancien marché de gros, une offre immobilière attractive et des services : conciergerie, studios d’accueil… Un des projets d’immeubles s’inspire de l’habitat participatif, une façon de favoriser la vie entre voisins. Confiés à l’Atelier VERA & Associés Architectes par Bouygues Immobilier, 11 logements en accession sont en effet destinés aux candidats éligibles au prêt à taux zéro (PTZ) et aux primo-accédants. Les futurs propriétaires de ces logements très abordables (3 600 euros/m²), du 2 au 5 pièces, ont été sélectionnés parmi une trentaine de candidats. Sur la base d’un questionnaire, ces derniers ont indiqué leur niveau de disponibilité et leur volonté de s’impliquer dans des ateliers qui s’échelonneront jusqu’à la livraison du programme, en 2022.
Aux futurs habitants d’imaginer les espaces communs : une salle de plus de 60 m² et un préau au rez-de-chaussée, ainsi qu’une toiture-terrasse entièrement accessible. Autre spécificité du concept : on ne choisit pas tout de suite son logement ; trois mois après avoir été retenus, les candidats s’entendent, lors d’une troisième réunion, sur la répartition des appartements avant de signer leur contrat de réservation. La vente est prévue l’année suivante, soit deux ans avant d’emménager. Guidées par des professionnels, les réunions mensuelles donnent l’occasion de faire évoluer la conception intérieure des logements et de définir les règles d’entrée dans la copropriété pour de futurs occupants.
Le promoteur s’est adjoint les services de l’Atelier Pop Corn, des médiateurs qui mettent en contact maîtres d’ouvrage et usagers.
Ce programme pilote s’inscrit dans le périmètre des trois îlots Sollys qui innovent dans les domaines de l’économie d’énergie, de la santé et du bien-être des usagers avec Eurêka Confluence, groupement porté par la SPL Confluence, la Métropole de Lyon (mission Énergie), Bouygues Immobilier, LinkCity et GE/Alstom, en consortium avec 70 partenaires.

Des habitants donateurs pour l’intérêt général

Grâce au financement participatif, ou crowdfunding, des campagnes d’appel aux dons permettent à des projets d’aménagement publics de voir le jour. Après la construction d’une passerelle à Rotterdam, le projet de restauration d’une promenade victorienne réputée, à Brighton, s’ajoute à la liste.

© Jim Hine

© Jim Hine

LE PROJET SAVE MADEIRA TERRACE, BRIGHTON – Une promenade en front de mer

© Brighton & Hove City Council

© Brighton & Hove City Council

Le projet Save Madeira Terrace, à Brighton, illustre ce récent phénomène. Les Madeira Terrace ont été construites au XIXe siècle, à l’époque victorienne, le long du front de mer. Elles constituent une galerie, réputée pour servir de scène à de très nombreuses manifestations – courses d’automobiles anciennes, marathon, etc. –, qui file sur 850 m le long de la plage.
Cet ouvrage d’art en fonte, très dégradé au fil du temps par la corrosion, a été fermé en 2013 pour des raisons évidentes de sécurité. Le coût de restauration et d’aménagement minimum des 151 arches est estimé à un montant total de 21,5 millions d’euros. Les municipalités de Brighton et de Hove se sont d’abord tournées vers le Heritage Lottery Fund, lui demandant de financer la restauration des 68 premières arches.
Au Royaume-Uni, une partie des gains de la Loterie nationale revient au Heritage Lottery Fund : en effet, sur deux livres Sterling, soit le prix d’un ticket, 56 pences (ou 28 %) sont distribués à de bonnes causes, comme la défense du patrimoine. Parallèlement, la plateforme britannique de crowdfunding, Spacehive, spécialiste des projets urbains, s’est chargée d’une levée de fonds et, en 2017, la première campagne de financement participatif a motivé 2 162 contributeurs – dont la municipalité et des organisations – qui se sont engagés à verser 520 000 euros. La somme recueillie sera utilisée pour la restauration des trois premières arches de la promenade. Elles serviront de vitrine pour un nouvel appel de fonds, en attendant la réponse du Heritage Lottery Fund pour la suite des opérations.

LE LUCHTSINGEL ROTTERDAM – Une passerelle en pleine ville

© Ossip van Duivenbode / ZUS

© Ossip van Duivenbode / ZUS

À Rotterdam, une nouvelle passerelle en bois, le Luchtsingel (« pont aérien » en néerlandais) relie depuis 2015 le quartier de Hofplein à la ville : un véritable parcours, long de près de 400 m et ponctué çà et là de quelques escaliers d’accès. Quartier piétonnier jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, Hofplein s’était peu à peu détaché de la ville alors qu’il est situé en son centre. Traversé par une voie de circulation rapide et une ligne de chemin de fer, il ne possédait pas d’atout remarquable. Ses habitants réclamaient depuis longtemps cette passerelle qui les sortirait de l’isolement.
En 2011, le conseil municipal de Rotterdam a incité les habitants à présenter des projets de revitalisation pour la ville. Puis ceux-ci ont voté pour les meilleures initiatives : le projet du Luchtsingel l’a emporté. Le budget participatif de la ville était de 4 millions d’euros mais ce n’était pas suffisant. L’idée de recourir au crowdfunding est alors venue d’équipes d’architectes, dont le futur maître d’oeuvre, Zones Urbaines Sensibles (ZUS). Le slogan choisi, « Plus vous donnez, plus long est le pont », a convaincu les habitants qui ont donné à la mesure de leurs espérances. Ainsi, en 2012, les dons individuels sont venus en renfort pour la construction du pont : 17 000 planches de bois ont été achetées à 25 euros l’unité en l’espace de trois mois, 100 000 euros ont été récoltés. La passerelle a été réalisée en éléments préfabriqués et les noms, souhaits ou messages des donateurs ont été gravés dans les garde-corps.
À une extrémité, elle traverse le Schieblock – immeuble désaffecté devenu hôtel d’entreprises qui a accueilli 80 sociétés – et, passé un embranchement circulaire, on accède soit à la gare située de l’autre côté des voies ferrées, soit à l’avenue principale. Grâce à ce projet, le quartier a gagné des espaces paysagers : un jardin à une extrémité, un parc sur le toit de la gare désaffectée – Le Luchtpark Hofbogen – et un potager sur le toit du Schieblock.
Les habitants du quartier sont les propriétaires du Luchtsingel. Le crowdfunding, qui a permis le décloisonnement de Hofplein, constitue un acte politique. « C’est une nouvelle réalité. Les gouvernements reculent mais les citoyens, eux, n’attendent plus que les choses arrivent », souligne Kristian Koreman, architecte associé de ZUS.

Demain la ville le lab
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