Changer notre vision de la pluie en ville
« Après la pluie vient le beau temps ». Nous connaissons tous ce proverbe qui, au-delà du simple aspect météorologique, nous amène à penser qu’à une mauvaise période en succède une meilleure. Comme si la pluie venait symboliser ce moment de difficultés, elle serait une métaphore de ce qui n’est pas bon. Car s’il est un élément avec lequel on est rarement content, c’est bien la pluie : tantôt on trouve qu’il pleut trop, tantôt pas assez et la juste appréciation de la pluie est dure à trouver. Et pourtant, on est obligé de composer avec cet élément difficilement prévisible et parfois capricieux. Alors au lieu de se plaindre et de la considérer comme une contrainte, pourrait-on faire de la pluie une opportunité ?
La pluie : une mauvaise réputation
La pluie a mauvaise presse. D’ailleurs, quand nos médias en parlent ce n’est généralement pas pour chanter ses louanges : on insiste sur les dégâts qu’elle cause par sa trop forte présence ou par son absence. Il faut dire que la pluie n’est pas le meilleur ami de l’homme. Elle est génératrice de dangers : par exemple sur la route notre visibilité s’amoindrit et les risques d’accident sont plus nombreux. Elle est synonyme de ralentissements ou de changements d’activités : la pluie nécessite une adaptation. Elle est aussi un vecteur de propagation des maladies ou des bactéries. Elle a une incidence sur le moral (on parle d’ailleurs de « mauvais » temps). Faire de la pluie en ville une opportunité c’est donc renverser tous ces codes et se saisir d’enjeux climatiques, écologiques, mais aussi économiques (dynamiser l’espace urbain les jours de pluie) ou encore de santé (en luttant contre la dépression légère qu’elle engendre). Alors peut-on faire de l’espace urbain un lieu qui permette d’apprécier ce phénomène naturel et incontournable ?
La pluie : une source d’inspiration
La pluie n’est pas qu’un élément négatif. Différents artistes, peintres, écrivains, réalisateurs, etc., ont cherché à rendre compte du potentiel poétique et créatif que peut offrir la pluie. Par exemple, la Cloud House (maison nuage) située au Farmers Park de Springfield dans le Missouri tente de valoriser la pluie. Il s’agit d’un abri qui collecte de manière ludique et poétique les eaux de pluie pour arroser des végétaux comestibles destinés à la cueillette des usagers du parc. Ces derniers s’assoient sur des chaises à bascules qui vont actionner des pompes permettant de faire remonter l’eau de pluie et d’arroser ainsi les plantes. On peut également citer l’une des façades du Kunsthofpassage de Dresde, en Allemagne, qui joue avec la pluie : l’immeuble est transformer en gigantesque instrument de musique que les gouttes de pluie vont venir mettre en marche. Ces projets montrent que la pluie peut être source de créativité et d’attractivité si l’on en fait un élément ludique et poétique.
La pluie : un potentiel design
Léa Grasset, étudiante en deuxième année de cycle master Ville durable à L’École de design Nantes Atlantique s’est, quant à elle, intéressée au potentiel design de la pluie pour son Projet de Fin d’Études. Il s’agit de faire en sorte que nos pratiques de villes ne soient pas amoindries par la pluie et de donner un nouvel attrait aux jours pluvieux. Pour Léa, la pluie est génératrice d’ambiances particulières que l’on peut chercher à valoriser. En effet, son bruit peut avoir des effets relaxants, les couleurs et les odeurs changent avec la pluie. Bref, la pluie nous offre tout un panel d’univers à exploiter pour réconcilier les usagers de la ville avec la pluie. Léa a choisi d’appréhender la perception de la pluie selon trois axes : un aspect ludique qui s’inspire de la vision qu’ont les enfants de la pluie (un prétexte à sauter dans les flaques), un aspect onirique qui tend à renforcer la vision poétique que l’on peut avoir de la pluie et un aspect fonctionnel qui cherche davantage à valoriser les activités que l’on peut pratiquer par temps de pluie. De quoi ne plus craindre la pluie mais donner envie de revêtir nos bottes en caoutchouc et, comme le dit la chanson, inviter les usagers : « viens faire un tour sous la pluie ».
Par Zélia Darnault, enseignante à L’École de design Nantes Atlantique
Vos réactions
Oui, c’est bien de voir le côté positif de ce que l’on considère comme une nuisance ! Bravo ! Il ne reste plus qu’à trouver des applications pratiques et adaptables à des villes de petite taille. Il n’y a pas que les grandes métropoles qui soient concernées. Il faut continuer dans ce sens.