Ces villes que l’on voudrait voir dans les jeux vidéo

Ceci n’est pas le screenshot d’un jeu vidéo AAA
17 Déc 2018

Après avoir passé en revue les représentations vidéoludiques de Tokyo, de Paris, des villes américaines, de Londres et de Hong Kong, nous allons prendre une voie différente pour le dernier article de cette série. Certaines villes du globe apparaissent peu (ou pas du tout) dans les jeux vidéo, et ce sont elles qui nous intéressent aujourd’hui !

Ceci n’est pas le screenshot d’un jeu vidéo AAA

Ceci n’est pas le screenshot d’un jeu vidéo AAA sorti récemment (malheureusement) – Crédits alanchng1978 sur Flickr

Dans les oeuvres vidéoludiques, il y a clairement une sur-représentation des villes nord-américaines, japonaises et d’Europe de l’Ouest. La plupart du temps, il s’agit de villes réelles (ou fortement inspirées du réel) que l’on découvre au gré d’une aventure, d’une course auto ou d’un combat. Aussi, on peut avoir affaire à des villes fictives que l’on bâtit, dans les jeux de construction[1], dans lesquelles l’architecture est quasiment toujours d’inspiration occidentale. Les explications sont simples : c’est là où vivent l’essentiel des joueuses et joueurs ciblés par les grands studios internationaux, et c’est également là où se trouvent ces grands studios internationaux… Cette loi de proximité[2] est compréhensible. Cependant, compte tenu de l’importance prise par les jeux vidéo dans les industries culturelles[3], et de l’influence que les représentations peuvent avoir sur les perceptions personnelles dans la réalité, il est nécessaire que la ville vidéoludique étende ses horizons. Joueurs et joueuses devraient pouvoir explorer et interagir avec des villes du Proche et Moyen-Orient, d’Europe de l’Est, d’Asie Centrale, du Sud et du Sud-Est, d’Afrique, d’Amérique Centrale et du Sud, autrement que dans des contextes de guerre et de destruction. Voici un listing (non exhaustif) des villes dans lesquels nous souhaiterions jouer davantage.

Découvrir et explorer les cultures lointaines

Pour le public occidental, l’intérêt des jeux se déroulant au Japon est dual : on a affaire à une culture que l’on connaît en surface (grâce à la large présence de la pop culture nippone chez nous), mais certains objets urbains nous sont inconnus ou incompréhensibles (car écrits dans une langue que l’on ne maîtrise pas), rendant cet aspect inaccessible délicieusement frustrant et fascinant.

Vous le voyez venir, le prochain blockbuster “monde ouvert” se déroulant dans une ville fictive pompée sur Lagos ?

Vous le voyez venir, le prochain blockbuster “monde ouvert” se déroulant dans une ville fictive pompée sur Lagos ? – Crédits Dock Slyper sur Flickr

Pourquoi ne pas envisager davantage de jeux sur ce modèle ? Evidemment, pour ce faire, il faut envisager une culture qui fait déjà l’objet d’une fascination de ce côté du monde. Plusieurs villes et/ou cultures pourraient parfaitement faire l’affaire : Rio de Janeiro, Séoul, Bangkok ou encore Singapour. Dans les trois premiers cas, il s’agit de villes tentaculaires, avec des cultures bien affirmées grâce à la musique, au cinéma et/ou au sport. La cité-Etat de Singapour est un peu moins tentaculaire, mais gagne en reconnaissance internationale ces dernières années grâce au cinéma, et offrirait un terrain de jeu multiculturel rafraîchissant, entre urbanisme futuriste, nature luxuriante, montagnes et liens forts avec la mer et les cours d’eau.

Rejouer l’histoire des plus belles cités

Nous avons vu avec le cas de Paris que les œuvres vidéoludiques étaient également une plateforme intéressante pour comprendre comment est appréhendée la question du patrimoine. Dans certains cas, le jeu vidéo se pose de fait comme un nouveau médium annexe pour parler d’archéologie, et d’histoire en général. La série des Assassin’s Creed est évidemment la plus connue dans le genre, nous propulsant tant durant les guerres du Péloponnèse (Ve siècle av. J.C.), la renaissance italienne (XVe-XVIe siècles), la Troisième Croisade (Proche-Orient du XIIe siècle) ou encore l’Egypte en passe de devenir romaine (Ier siècle av. J.C.).

Aussi, pourquoi ne pas explorer d’autres villes chargées d’histoire, aujourd’hui comme dans le passé ? Commençons avec le cas particulier de Jérusalem, déjà représentée dans le tout premier Assassin’s Creed. Ville littéralement multimillénaire, à la croisée des trois religions du Livre, Jérusalem est un bouillon de cultures. Et si le contexte géopolitique actuel rend la conception d’un jeu se déroulant dans un contexte contemporain plutôt complexe, entre les mains du bon studio, un jeu d’exploration urbaine situé à Jérusalem serait fantastique. Dans le même ordre d’idée, la Bagdad des Abbassides, le Damas des Ayyoubides, le Tombouctou des Songhaï ou la Samarkand des Timourides seraient des décors parfaits pour des jeux épiques. Au passage, ils nous rappelleraient la grandeur passée de ces villes.

Vivement le Assassin’s Creed à dos d’alpaga

Vivement le Assassin’s Creed à dos d’alpaga – Crédits Guillén Perèz sur Flickr

Au-delà des zones de conflits, pensons également à des villes comme Ispahan, Cracovie, Delhi, Mombasa ou Quito. Outre le patrimoine qu’elles abritent, leur histoire multiséculaire invite à la création d’intrigues riches et variées, qui pourraient agir comme des portes d’entrée vers les cultures représentées.

Expérimenter les mobilités du monde entier

Si les mobilités sont plutôt bien exploitées dans la série des Grand Theft Auto, cette question reste largement inexplorée par le jeu vidéo. Certes, des jeux comme Cities in Motion (2011) ou Mini Metro (2015) nous mettent dans la peau de responsable des flux d’une ville donnée. Cependant, ce que l’on souhaiterait par dessus tout, c’est expérimenter en direct le plaisir (ou la galère) de se déplacer dans une ville existante. Comment fait-on quand on est coincé dans un bouchon monstre à Mexico, Sao Paulo ou Beijing ? Dans le même ordre d’idée, comment se déplace-t-on à Moscou, piégé dans un blizzard, ou à Dubaï pendant une tempête de sable ?

Rien que pour monter dans cette voiture il nous faudrait un GTA à La Havane

Rien que pour monter dans cette voiture il nous faudrait un GTA à La Havane – Crédits Pedro Szekely sur Flickr

De façon générale, la problématique des transports et des mobilités ailleurs qu’en Occident est un champ entier dont peut s’emparer le jeu vidéo, à l’opposé du jeu de course. Cela ne vous dirait pas d’essayer de traverser Le Caire, Istanbul ou Hanoi en voiture ou en scooter, en pleine heure de pointe, à jouer des coudes pour vous imposer sur l’asphalte tout en évitant de renverser les autres usagers plus fragiles ? Parce que nous, oui. Beaucoup.

Les jeux vidéo nous ont montré que la Terre entière était un immense terrain de jeu. Pourtant, à l’heure actuelle, seulement une infime partie de cet espace à parcourir virtuellement est exploitée. Il est grand temps que les studios de développement, grands comme petits, s’emparent du reste du monde : pourquoi créer un énième jeu se déroulant à New York alors que les villes d’Afrique, d’Amérique Latine et d’Asie vous ouvrent leurs bras ?

[1] Les jeux de construction – surtout sur PC – connaissent une renaissance en ce moment. Plus d’une vingtaine de titres de ce genre sont attendus entre 2019 et 2020.

[2] Nous reprenons ici ce principe appliqué habituellement à la presse : une information aura plus ou moins d’importance dans les médias (et aux yeux du public) en fonction de sa proximité (qu’elle soit géographique, temporelle ou sociologique). Un fait divers nous touchera plus s’il a lieu près de chez nous qu’un autre fait divers de même ampleur ayant lieu à des milliers de kilomètres de là.

[3] Aujourd’hui, le jeu vidéo est le premier marché culturel à l’échelle mondiale, loin devant le cinéma ou la musique.

{pop-up} urbain
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Vos réactions

Kadisch
23 janvier 2019

Approche très intéressante et originale ! J’aime beaucoup ! Un jeu n’a pas été mentionné ! Le jeu Driver permettait de parcourir 2 villes du sud ! Istanbul et La Havane dans 2 opus différents, les villes y étaient bien représentées, en replaçant ces jeux dans leurs années de sortie. Certes, la surreprésentation des villes du Nord est certaine, mais Driver est à retenir 🙂

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