Bientôt une coulée verte à Marseille ?

Une coulée verte au cœur du tissu urbain, c’est le dernier projet d’Euroméditerranée, la gigantesque opération de réhabilitation du centre de Marseille. Un défi de taille qui s’inscrit dans un programme de réintroduction de la biodiversité en ville et de prévention du risque d’inondations des habitations.

2035, Marseille sauvée des eaux

Tous les spécialistes s’accordent à le dire, c’est le héros de l’année 2035. Si les violentes pluies de l’automne n’ont pas entraîné d’inondations massives dans les quartiers nord de Marseille, c’est grâce au ruisseau des Aygalades. Celui qui ressemblait auparavant à un caniveau pollué et parsemé de déchets plastiques est aujourd’hui nettoyé et végétalisé. Les riverains parlent d’une renaissance. Berges et cascades sont redevenues des lieux foisonnants de biodiversité. En lieu et place de l’ancienne gare du Canet où il passait sous terre, le ruisseau est désormais à l’air libre. Le site ferroviaire a été désimperméabilisé pour créer le parc des Aygalades, une gigantesque coulée verte de 22 hectares en mesure de contrer les pluies torrentielles.

La gare du Canet doit céder la place à la coulée verte – Wikipédia

Mutations phocéennes

Endiguer une inondation est un pari ambitieux, mais c’est l’une des fonctions tant attendues du futur parc des Aygalades, qui prévoit de réhabiliter  le ruisseau du même nom dans les prochaines années. L’opération fait partie du colossal plan de renouvellement urbain Euroméditerranée qui refait une beauté au centre-ville de Marseille depuis près de trois décennies. Au milieu des années 90, la cité phocéenne était mal en point : la baisse des activités portuaires et maritimes s’est accompagnée de la perte de près de 50 000 emplois et de 150 000 habitants en 20 ans. Elle affichait un taux de chômage de 22%, soit le double de la moyenne nationale. Le projet Euroméditerranée  a été créé pour freiner ce phénomène. Avec pour appuis les financements des collectivités territoriales, de l’État et de l’Europe, il entend diversifier les activités de la ville – notamment le tertiaire – et développer les équipements publics. L’opération d’aménagement des 480 hectares de la ville a donné naissance à l’un des plus grands quartiers d’affaires de France, notamment avec  la réhabilitation des Docks ou encore de la Friche Belle de Mai.

Dépolluer la nature

Si l’on peut se réjouir de la mise en place d’espaces verts de qualité dans un quartier minéral,  réinsérer la nature en milieu pollué est une question complexe et nuancée. Le parc de Bougainville, qui marque le début de la coulée verte, reposerait sur un site pollué aux métaux lourds et aux hydrocarbures. La directrice de projet Anita Leroux explique au journal en ligne marseillais Marsactu comment les implantations successives ont  fini par piéger des pollutions anciennes au fil du temps : « En clair, les industriels ne s’embêtaient pas : pour installer leur activité, ils faisaient tomber les murs de l’entreprise précédente, aplatissaient le tout et construisaient dessus ». Même problème pour le ruisseau des Aygalades, géré par l’entreprise Lafarge qui n’hésite pas à y puiser son eau pour les besoins de son usine La Malle à Bouc-Bel-Air dans les hauteurs de Marseille. Ce site, qui compte parmi les 50 sites industriels les plus polluants de France, avait été ciblé en décembre 2022 par une action de sabotage d’écologistes locaux soutenus par les Soulèvements de la Terre.

Cascade du ruisseau des Aygalades – Tourisme Marseille

Autre exemple : le labo pharmaceutique SPI Pharma qui rejette des sels d’aluminium liés à la fabrication de ses produits en aval du cours d’eau … La Gazette du Ruisseau rappelle en ce sens,, que « L’eau n’est pas neutre, mais pétrie d’enjeux sociaux, institutionnels, politiques ».