A Montpellier, un programme pour résorber les bidonvilles
C’est le fruit d’un travail mené par plusieurs associations, dont la fondation Abbé Pierre et Médecins du Monde, dans la décennie 2020 : et si, en 2035, les bidonvilles avaient disparu de la métropole de Montpellier ? Un résultat enthousiasmant qui inspire toutes les municipalités qui entendent lutter contre le mal-logement, et ce à travers le monde.
2035. À l’approche des lieux, Lina se met à frissonner. 10 ans qu’elle n’a plus mis les pieds dans le quartier Celleneuve à Montpellier. Depuis la « résorption » du bidonville, elle, ses proches et les 165 personnes qui vivaient là ont été relogés par les services sociaux dans les quartiers environnants. Occupé pendant 12 ans jusqu’à son évacuation en avril 2022, c’était le plus grand bidonville de la métropole. Aujourd’hui, longer la rue du Pilory est une expérience de dépaysement troublante : les souvenirs rejaillissent par dizaines, mais tout est différent. La rue a été métamorphosée par l’action de la mairie qui, une fois la parcelle récupérée, a fait construire un bâtiment de police municipale, un groupe scolaire et un parc. En fait, c’est comme si le bidonville n’avait jamais existé…
Vous avez dit résorber ?
Le sujet des bidonvilles et de l’habitat informel est un des plus complexes en matière d’urbanisme. Né d’un manque de logements accessibles, il s’entremêle rapidement à des problématiques d’emploi, de scolarisation, de précarité ou de santé. Les associations de lutte contre le mal-logement en sont bien conscientes et œuvrent depuis des années pour que l’on approche enfin les bidonvilles par l’angle social. C’est le cas du programme « Montpellier zéro bidonville » mené de concert par AREA, La Cimade, Médecins du Monde et la Fondation Abbé Pierre et dont l’objet est d’initier la résorption des bidonvilles de la métropole par un accompagnement social et éducatif global. Sur 6 ans, jusqu’en 2027, ces associations se sont engagées à co-construire des solutions de relogement avec les habitants.
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Spirale de précarité
Le choix ici de l’exemple de Celleneuve n’est pas anodin, il fait partie des sites prioritaires identifiés par le programme Montpellier zéro bidonville. En avril 2022, ses habitants ont été évacués pour être logés dans un « village de transition », un camp temporaire où les services sociaux peuvent travailler au mieux. On y trouve en particulier l’électricité et l’eau courante, mais aussi des espaces partagés pour apprendre le français ou élaborer un projet de relogement. Accordé pendant 2 ans par la mairie de Montpellier, ce site doit permettre de trouver des solutions durables à tous les habitants, en fonction de leurs besoins.
Le changement de paradigme
La municipalité, la métropole et l’État sont partenaires de l’expérimentation. C’est une collaboration inédite sur le sujet des bidonvilles, sujet qui pendant longtemps n’a été traité que par les expulsions (à Montpellier ou ailleurs). Ce changement de paradigme semble avoir été initié en janvier 2018 par l’instruction d’un nouveau cadre d’action par le gouvernement, signé par 8 ministres. Il s’inspire des travaux de terrain des associations. Des mots de la Dihal (la Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement), les évacuations sont court-termistes : elles sont inefficaces pour résorber les bidonvilles, accroissent la précarité et coûtent plus cher à la collectivité. « Le changement de paradigme est engagé dans la plupart des territoires concernés. Des sites sont résorbés définitivement. Des personnes accèdent à l’emploi, de plus en plus d’enfants vont à l’école, ce qui est essentiel pour casser la spirale de reproduction de la grande précarité. »
Bidonville entre Paris et Aubervilliers © Yann Vernerie