Une ville “déconnectée” est-elle encore possible ? (1/2)
Vous pestez lorsque votre article en ligne est soudain illisible dans les transports en commun, mais vous détestez que vos collègues essayent de vous joindre le week-end ? Retour sur une tendance citadine en plein essor : celle de la pause numérique.
La montée du digital detox
Technologies chronophages et pression sociale sont les maîtres mots de la déconnexion volontaire. Sans forcément envisager la véritable cure de désintoxication, la plupart des personnes aspirant à cette pause numérique sont bien souvent et avant tout victimes de leur professionnalisme. Ainsi, une grande partie des candidats ne cherchent qu’à fuir leur travail lorsqu’ils sont en congés. Rien de plus habituel en effet que de consulter ses courriers électroniques un dimanche… Si Internet aura permis l’essor heureux du télétravail, il aura aussi – et logiquement – fait tomber les barrières entre les sphères intime et professionnelle.
Mais le mouvement des déconnectés volontaires est loin de ne caractériser que ces martyrs du travail 2.0. Et il n’a d’ailleurs pas non plus attendu l’avènement du smartphone dernier cri pour faire son apparition ! En effet, la première journée mondiale sans téléphone voyait le jour en février 2001… Pourtant, depuis quelques années le phénomène semble prendre de l’ampleur, tant les médias généralistes ont su se réapproprier le sujet.
Les témoignages de personnes ayant “tenté l’expérience” de la pause numérique ne manquent dès lors pas sur la toile. A l’échelle d’une journée ou d’une semaine, les plus courageux s’essayent donc ici et là à la vie sans téléphone portable ou sans Internet pour le meilleur et pour le pire ! La déconnexion consentie forme somme toute une sorte de défi lancé à soi-même, collé sur un modèle semblable aux divers régimes alimentaires et autres trêves d’addictions…
De la déconnexion à la technophobie
Enfin, le gros mot est lancé : le temps passé à envoyer des sms ou à poster des photos sur les réseaux sociaux relève-t-il d’une certaine accoutumance comparable à celles provoquées par certaines drogues comme le tabac ? C’est en tout cas ce qu’avancent certains observateurs :
“La nomophobie (no mobile phobia), ou peur d’être séparé de son téléphone portable, vous connaissez ? Ce néologisme vient à peine d’apparaître qu’il serait déjà l’un des maux les plus répandus de la planète, avec 66% des utilisateurs de mobile qui s’en plaignent. Lorsqu’un utilisateur moyen consulte son téléphone portable environ cent cinquante fois par jour, y compris pendant les repas par exemple, que reste-t-il à la convivialité ? Doit-on tirer la sonnette d’alarme, comme l’a fait Sherry Turkle, ou même ouvrir des centres de désintoxication ?”
L’article de Tommy Pouilly cité ci-dessus affirme en réalité tout le contraire. Du moins, il émet une autre interprétation plus distancière de ces nouvelles pratiques dites numériques. Reprenant la thèse d’un article du New York Times, celui de RSLN se demande si la panique provoquée par le constat d’une certaine dépendance aux objets connectés ne serait finalement pas une réaction sociale connue… En effet, ils comparent tous deux ces agitations à celles portées contre la télévision à ces débuts. L’engouement actuel pour nos “écrans de poche” ne serait finalement que passager, tout comme les accusations angoissées de leurs détracteurs. Selon vous, les nouveaux usages numériques relèvent-ils d’une aliénation certaine ou fabriquent-ils bien plutôt les modes de vie « modernes » ?
Pour aller plus loin :
- Les déconnectés volontaires – Sur Le Journal du CNRS
- Philippe Moati (dir.), Nouvelles technologies et modes de vie, aliénation ou hypermodernité ?, Editions de l’aube, 2005.
- Est-ce que la technologie désurbanise la ville ? – Sur Internet Actu