L’humain au cœur de la ville de demain
« Quelle ville voulons-nous aujourd’hui ? Des décisions doivent être prises. » Dans le cadre de la conférence Cities for Life, la salle du Conseil de Paris accueillait le 22 novembre dernier Carlos Moreno, scientifique et spécialiste de la ville intelligente, l’architecte Manuelle Gautrand et Patrick Jolibois, responsable du développement chez WICONA. L’occasion de revenir sur les défis et les opportunités d’un urbanisme adapté à notre époque.
La loi sur la piétonisation des voies sur berges à Paris a entraîné cette année une vive opposition. « C’était le choc de deux mondes, de deux paradigmes » rappelle Carlos Moreno, entre une vision plus écologique de la ville et une autre dans laquelle la voiture individuelle prime sur la qualité de l’air. La preuve que l’adhésion du citadin est essentielle à la réussite de tout projet urbain.
Revitaliser un quartier en douceur
Pour Manuelle Gautrand, « la densification n’est pas maussade ». Lauréate de l’appel à projets Réinventer Paris avec les logements Edison Lite dans le XIIIe arrondissement, elle promeut l’acupuncture urbaine, c’est-à-dire des opérations architecturales sur une petite échelle. Le dialogue et l’entraide intergénérationnelle au sein de l’immeuble, la conciergerie et la crèche sont autant de facteurs qui viennent revitaliser en douceur un quartier.
Faire prendre de la hauteur à la rue
Deux exemples, l’un en Suède (un projet privé) et l’autre en Australie (public) illustrent sa pratique à l’étranger. « Il fallait à Stockholm restructurer un bâtiment emblématique de l’architecture brutaliste. J’ai voulu faire monter la rue sur les toits, pour qu’elle devienne verticale. » La restructuration de l’ensemble immobilier, nommé Brädstalpen, a été l’occasion de coiffer la toiture avec un jardin et d’offrir ainsi aux habitants un accès sur le toit « pour redécouvrir leur ville et sa skyline ». Manuelle Gautrand décloisonne la rue et lui fait prendre de la hauteur. Requalifier, voir réveiller un monument patrimonial, implique de le rendre plus poreux, plus accessible, plus communautaire. La mixité des programmes favorise justement l’interaction et les échanges au sein d’une ville, d’un quartier.
Favoriser les échanges entre les élus et les habitants
À Parramatta, une commune dynamique de Sydney, les autorités souhaitaient un « objet architectural iconique » pour accueillir les salles du conseil municipal, des espaces associatifs, une médiathèque et un centre de contrôle Smart City (smart city grid center). Une commande dont la priorité est de favoriser avant tout les échanges entre les élus et les citoyens, un paramètre essentiel de la ville intelligente.
Un bâti flexible, des usages multiples
La réduction des inégalités et l’ouverture de la ville aux zones périurbaines figurent parmi les nombreux défis de l’urbanisme selon Patrick Jolibois. « Il faut des espaces partagés par tous, où les citoyens sont usagers et acteurs du changement dans la ville. » La flexibilité du bâti est une opportunité à saisir aujourd’hui pour encourager la multiplicité des usages dans le temps. Pour Carlos Moreno, « la ville-rebutoir privilégie l’espace privé », au contraire de la ville intelligente qui fait la part belle à l’espace public, soigné et ouvert à tout le monde.