La ville, patrimoine nourricier – Utopies urbaines 6/7
L’exercice est convenu : « dessine-moi une ville verte ». Les étudiants du Design Lab Ville Durable de l’Ecole de Design Nantes Atlantique, encadrés par Clémentine Laurent-Polz, architecte, se sont prêtés au jeu de la confrontation des imaginaires en partant d’une donnée : les changements des modes de production agricole.
Et si en 2050… De nouveaux modes de consommation façonnent le territoire
Imaginez une ville autosuffisante, où les supermarchés n’existent plus, remplacés par de nouveaux modes de consommation. Quelles conséquences pour l’organisation du territoire ? Comment repenser les usages dans la ville ? Ce sont ces interrogations qui ont guidé Delphine Huart, Erwan Chansou, Alice Le Mouel, Camille Dauhut et Grégoire Moinard, tous étudiants en quatrième année à l’Ecole de Design Nantes Atlantique. Pour eux, l’agriculture sera intra-métropolitaine et la ville remplira un rôle de mère nourricière.
Et si c’était nos modes de consommation qui façonnaient notre territoire ? C’est de ce postulat qu’est parti ce groupe d’étudiant. « Nous avons imaginé qu’en 2050 il n’y aurait plus de supermarchés. L’entomophagie (consommation d’insectes) aurait remplacé nos régimes alimentaires carnassiers. L’élevage des bovins serait donc limité ce qui donnerait l’occasion de valoriser la culture de protéines végétales qui a l’avantage d’être beaucoup moins énergivore », explique Delphine Huart, étudiante en Mutations du cadre bâti. Les conséquences de ce mode de vie sur l’espace sont directes : les toits végétalisés et les potagers partagés se multiplient dans la ville. La végétalisation des immeubles n’offre pas qu’une garantie de manger mieux : elle est également un excellent isolant phonique et thermique. Une façon d’allier le bien manger et les économies d’énergie !
Une ville autosuffisante
La zone périurbaine polluée, et donc inexploitable pour l’agriculture, devient un champ de production d’énergie, toujours dans l’idée d’avoir une ville autosuffisante. Un paratonnerre et des réservoirs d’eaux pluviales ont été installés pour une meilleure gestion de l’énergie.
Protéger les ressources naturelles
« Nous avons voulu que toutes les constructions soient verticales afin de limiter l’étalement urbain », complète Alice Le Mouel, étudiante en Mutations du cadre bâti. « C’était également pour nous une façon de montrer que la préservation du patrimoine vivant et paysager pouvait être amenée à dépasser celle du patrimoine bâti. Nous avons même choisi d’en faire une valeur fondamentale ». Et parmi les réservoirs de biodiversité à particulièrement choyer il y a le fleuve, lieu de passage et de contemplation. « Nous avons proposé qu’une voie piétonne qui puisse être franchie par les résidents et les touristes traverse le fleuve», ajoute Erwan Chansou, étudiant en Nouvelles Mobilités. « Pour nous la gestion de l’eau doit être plus réfléchie et la zone fluviale pourrait générer du lien social grâce à une aire de baignade naturelle ».
Encourager de nouvelles pratiques alimentaires
Mais le fleuve pourrait aussi être exploité pour les besoins des nouveaux modes de consommation alimentaire : « la production des denrées alimentaires est diversifiée grâce à l’aquaponie », explique Camille Dauhut, étudiante en Nouvelles Pratiques Alimentaires. « Et ce n’est pas le seul apport que nous avons choisi : des fermes urbaines à insectes ont vu le jour et ont remplacé les fermes traditionnelles, preuve que la transition protéique est opérée ».
Dans cette vision utopique, l’espace urbain et l’espace rural changent de nature et ne s’opposent plus : ils composent harmonieusement le territoire de la ville de demain.
Et si l’approvisionnement des villes en nourriture façonnait nos territoires demain ? Ces utopies, ou parfois contre-utopies, sont le moyen de réinterroger l’économie et le rapport du citoyen au territoire au travers du design urbain. Une saga en 7 volets.
Par Zélia Darnault, enseignante