La nouvelle maison des jours meilleurs
Et si la cabane dépassait le statut de simple refuge écologique, en ville comme à la campagne ? Ce micro-habitat pourrait bien devenir une solution au problème du mal-logement, toujours plus criant en France comme ailleurs. Mini Maousse en appelle à l’inventivité et à la poésie des étudiants.
En France, 3,5 millions de personnes sont mal logées d’après les chiffres du rapport 2015 de la Fondation Abbé Pierre. La crise économique a engendré une forte hausse de la pauvreté. Résultat, elle concerne désormais 14,3 % de la population française. Le concours Mini Maousse, lancé par la Cité de l’Architecture et du Patrimoine, vise à « imaginer des petites maisons temporaires pour répondre au manque de HLM et au mal-logement. » Il s’agit de la 6e session de ce concours, ouvert aux écoles francophones belges, suisses, et tunisiennes. Il est consacré cette année à l’aménagement de lieux de vie temporaires et s’intitule « la nouvelle maison des jours meilleurs, » en référence à Jean Prouvé et à la maison qu’il avait créé pour l’Abbé Pierre.
5 prototypes seulement
L’Abbé Pierre fait appel au designer Jean Prouvé après l’hiver 1954. Les pouvoirs publics refusent à l’époque la construction de logements d’urgence. Il demande alors à Jean Prouvé la réalisation d’un habitat de type F3, reproductible et économique, composé de deux chambres et un salon, avec cuisine et salle d’eau. La maison est montée en sept heures pendant le salon des Arts Ménagers. Pour Le Corbusier, « Jean Prouvé a installé sur le quai Alexandre III la plus belle maison que je connaisse, le plus parfait moyen d’habitation, la plus étincelante chose construite ». Mais les normes auront eu raison de l’ingéniosité de Prouvé : la cuisine et la salle d’eau ne présentant pas d’ouvertures sur l’extérieur, seuls 5 prototypes furent réalisés.
Une petite architecture qui doit faire le maximum
Aujourd’hui, l’urgence sociale appelle à réinventer une nouvelle forme d’habitat adapté aux préoccupations écologiques, pour fournir enfin un logement décent aux milliers de personnes concernées. Le concours Mini Maousse invite « à concevoir une unité modulable, adaptable, empilable, démontable et transportable pour répondre à différentes situations, depuis l’accueil d’individus isolés, de ménages avec ou sans enfants en très grande précarité vivant sur des terrains, à l’exemple des bidonvilles ; en passant par l’habitat collectif et temporaire, de type camp de vacances saisonnier ; jusqu’à l’habitat en zone dense pour étudiants, travailleurs précaires et familles en attente d’un accès au logement ». Il s’agit selon les termes du concours, de concevoir une petite architecture qui doit faire le maximum !
« En créant Mini Maousse en 2003, j’imaginais un concours réunissant étudiants en architecture, en art, paysage, design ainsi que des ingénieurs », affirme Fiona Meadows, architecte et professeure à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine. Elle a notamment fondé en 2005 l’AoA, l’Organisation des Architectes Alternatifs, basée à Saint-Denis et défend une architecture de l’engagement. « À l’époque, les concours offraient un peu d’argent ou des voyages mais pas la possibilité de mettre la main à la patte et de tester ses idées à l’échelle 1, ce qui est essentiel à l’ère du tout virtuel ». Les lauréats de Mini Maousse se verront offrir la possibilité de concrétiser leurs inventions dans le cadre d’un workshop organisé à l’Ecole Supérieure du Bois à Nantes.
La question de la densité et de l’insertion
Le concours Mini Maousse propose cette année trois sites : la rue des marchandises et le boulevard Victor Hugo à Nantes ainsi qu’un terrain à Saint-Jean-de-Monts en Vendée. Les projets des candidats doivent correspondre à ces trois sites, qui chacun posent des questions différentes selon Fiona Meadows : « le boulevard Victor Hugo pose la question de la densité et de la verticalité, la rue des marchandises pose la question de l’insertion, celle de plusieurs familles roms ; enfin le terrain à Saint-Jean-de-Monts est destiné à accueillir un centre de vacances, dont la ville de Saint-Denis est propriétaire ». La sélection des 5 à 12 projets lauréats aura lieu en avril prochain, avant d’être étudiés en mai et juin avec l’École Supérieure du Bois de Nantes. Le workshop de réalisation se tiendra en juillet. Il faudra encore attendre le mois d’octobre pour découvrir « la nouvelle maison des jours meilleurs » avec une exposition et un catalogue à retrouver à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine.
Toutes les informations et le descriptif du concours sont disponibles sur :