Fragments de nature en milieu urbain
Du label “ville fleurie” aux grands projets d’éco-quartiers, la domestication végétale est bien souvent synonyme de qualité de vie urbaine dans l’inconscient collectif. La réintroduction d’éléments naturels ou l’adoption de modes de vie plus “pastoraux” en ville forment dès lors des sujets traditionnellement croisés au cours de notre veille… Parmi toutes les décisions et actions qui foisonnent depuis un certain temps sur le territoire français, certaines assez récentes nous ont marqué pour leur spontanéité ou leur délicatesse. Morceaux choisis de pâtures urbaines.
Gazons maudits : libérer la nature
Tandis que l’Homme tente depuis toujours de “dompter” Dame Nature, l’habitant des villes a plutôt tendance à l’emprisonner… En effet, l’espace urbain tel qu’on le construit traditionnellement laisse peu de place à la végétation. Bien souvent, la floraison d’une ville sera très encadrée, qu’elle le soit par des règles juridiques fortes ou par des aménagements urbanistiques radicaux.
Ainsi, nous ne comptons plus les “pelouses interdites” et autres corsets d’arbres étouffants qui parsèment les rares espaces verts de nos étendues de béton…
En ville, les éléments naturels sont avant tout sous surveillance, et ceci pour le meilleur ou pour le pire de leur développement vital… Si la nature ne peut en effet pas concrètement “reprendre ses droits” dans une ville habitée, certaines initiatives novatrices peuvent au moins être portées envers ces portions de vie verdoyantes.
Rende visible une flore ignorée
Les innovations menées en faveur de la botanique des villes peut alors prendre une multitude de formes, ainsi qu’être conduites par un éventail varié d’acteurs. Le premier cas récent qui a attiré notre attention et ravi notre sensibilité s’incarne dans une action menée par une personne au départ complètement anonyme.
Vous les aurez peut-être vu passer sur les réseaux sociaux, ces nomenclatures en lettres blanches, pochées sur le goudron comme le tapis-brosse de touffes d’herbes inattendues :
Ce street-art mystérieux est en fait l’oeuvre de Frédérique Soulard, apprentie herboriste. Le principe est simple : redonner aux adventices invisibles et mal aimées leur identité propre. Les lettres majuscules éparpillées sur le sol de la ville de Nantes ne sont rien d’autre que les noms vernaculaires de ces herbes indésirables.
Ainsi, en marquant au fer blanc les fissures décorées des rues nantaises, Frédérique Soulard ressuscite de façon originale une nature délaissée et méconnue du grand public urbain.
Une végétation sociabilisante
Autre cas, plus classique, croisé au détour d’un week-end lyonnais : celui d’adorables jardins partagés au beau milieu d’une avenue commerçante. Si l’on ignore qui fut précisément à l’origine de ces îlots de verdure, il est certain que l’oeil du passant n’y sera pas indifférent.
Nichés au pied de plusieurs arbres plantés sommairement au bord de la route, trois petits jardins aménagés par des riverains ont récemment vu le jour le long de l’avenue Jean Jaurès dans le 7e arrondissement de Lyon.
Vous y trouverez alors une flore variée et en bonne santé, ainsi qu’une poignée de malignes attentions. Des pots en terre pour les mégots de cigarettes, des rangées de cailloux pour l’urine canine et des messages écrits à la volée !
“Chers voisins, chers passants, voilà deux mois que ce petit jardin existe. Il a remarqué les sourires sur vos visages et le respect de tous. Preuve que la confiance est possible, qu’habiter ce n’est pas forcément posséder pour soi, mais s’exposer au dehors, créer, offrir… Pour le plus grand bonheur de tous ! Prenez soin de moi et bravo aux autres petits jardins du quartier !”, peut-on lire sur l’une des feuilles accompagnant cette délicieuse idée.
Ces quelques exemples de pâturages urbains forment à nos yeux les échantillons d’une nature urbaine agile appréciable, par opposition à certaines grandiloquences végétales peu écologiques et pourtant très présentes dans le discours dominant. Ainsi, construisons donc une ville plus pudique et moins herbicide, en s’inspirant volontiers du haïku japonais plutôt que de certaines oeuvres de science-fiction spectaculaire !
Vos réactions
TOUCHE…!
DES FLEURS ET DES POÈMES
PARLER A SES VOISINS !!!